La tourmente débute en Ethiopie avec l’annonce de plusieurs cas d’athlètes positifs. Quelques noms ont commencé à circuler, confirmant que la lutte anti-dopage débute enfin dans ce pays, mais le scandale devrait s’amplifier avec l’annonce attendue d’un très grand nom. L’affaire Abeba Aregawi pourrait peser de manière forte sur les futures révélations.
Les rumeurs grondaient depuis plusieurs mois, et il paraissait impossible que l’Ethiopie échappe à la traque de l’anti-dopage. Comment imaginer que ce pays ait pu rester jusqu’ici quasiment vierge de contrôles positifs ??
Le voile avait commencé à se lever courant 2015, avec l’apparition en mars sur la liste des athlètes suspendus par l’IAAF d’Eyrusalem Kuma, pour EPO, puis en décembre du marathonien Tesfaye Assefa, suspendu deux ans pour un refus de contrôle, et tout récemment en janvier 2016 s’ajoutait Getnet Selomie, pour testostérone. Trois cas, c’était bien peu à considérer la situation chez son cousin du Kenya, avec plus d’une trentaine de cas.
Mais la machine est en train de se dérégler, et la fédération éthiopienne a pris les devants pour annoncer que neuf cas seraient actuellement à l’étude auprès de l’agence anti-dopage éthiopienne. Selon les informations livrées au journal « The Guardian », le médecin de l’équipe nationale, Ayalew Tilhaun évoquait la détection de stéroïdes, testostérones, éphédrine et furosémide.
Qui sont les athlètes incriminés ? Le secret demeure, mais un très grand nom en ferait partie. C’est la rumeur en cours en Ethiopie. Avec la crainte du séisme qui pourrait suivre pour l’athlétisme éthiopien.
Sintayehu Merga, 2h12 à la Rochelle et Reims, 2h09 en Chine
A ce jour, seuls deux noms sont apparus. Le premier, Sintayehu Mergia, s’est lui-même identifié, en prenant la parole auprès d’une radio éthiopienne, pour nier les faits. Egalement désigné sous le nom de Sentayehu Merga, il est le frère de Deriba Merga, vainqueur du Marathon de Boston en 2009, et a souvent couru en France, victorieux à la Rochelle en 2009 et à Reims en 2013. A chaque fois avec un honnête chrono de 2h12’. Mais en Chine en décembre dernier, à 30 ans, il passe la surmultipliée avec 2h09’57’’…
Autre identité dévoilée, cette fois par le journaliste éthiopien Zecharias Zelalem : celle d’un autre marathonien, Berhahu Girmay, (ou Birhanu GIRMA), il avait bouclé Dubaï en 2h05’49’’ en 2014.
La tension monte en Ethiopie, dans la foulée du scandale suscité par le contrôle positif de l’ex-Ethiopienne devenue Suédoise Abeba Aregawi. La presse suédoise s’est emparée de l’affaire, qui a créé un sacré tumulte en Suède, où les langues se délient pour révéler les secrets très bien gardés autour de son faux mariage sur lequel les officiels de la Fédération ont fermé les yeux, trop contents de voir leur équipe renforcer par un tel talent…
La presse suédoise en embuscade à Sululta
Et les journalistes suédois ne s’embarrassent pas de beaucoup de précautions pour lâcher des noms, de médecins qui seraient à mettre en cause dans le dopage d’Aregawi. C’est tour à tour un Ukrainien qui est pointé du doigt, puis un Turc, également chargé de fonction pour l’Azerbaijan. L’équipe du quotidien « Sportbladets » envoyée à Addis Abeba explique même qu’une source bien placée dans l’enquête menée en Ethiopie ferait état d’arrestations de plusieurs médecins, russes et ukrainiens, qui auraient déjà été interpellés par la police, et placés en détention dans la prison Kaliti.
Un lieu hautement symbolique pour la Suède, le journaliste Martin Shibbye y avait été détenu plusieurs mois après avoir été interpellé lors d’un reportage en Ogaden. Et il avait fallu une mobilisation dans son pays pour que sa condamnation soit annulée.
L’affaire Abeba Aregawi apparaît tomber au plus mal (ou à point nommé ???, selon le point de vue !) pour l’Ethiopie? pour son risque de « dommages collatéraux ». En Suède, pays marqué par des tensions raciales fortes, la vindicte contre l’athlète et les officiels l’ayant protégée se révèle très forte et incite les journalistes à des investigations poussées qui pourraient lever le voile sur des pratiques touchant ses partenaires d’entraînement de Sululta, devenu le lieu phare de l’entraînement en Ethiopie…
- Texte : Odile Baudrier
- Photo : Gilles Bertrand