La liste des suspensions publiée par l’Athletics Integrity Unit en cette fin février 2023 recense 31 sanctions, un nombre record ! Toutefois la plupart frappe des athlètes indiens de seconde zone, ou des Russes retraités, et souvent déjà suspendus précédemment. Le marcheur ukrainien Nazar Kovalenko est suspendu pour la deuxième fois. Il comptait parmi les habitués de Font Romeu, à l’époque de Bertrand Moulinet.
Une liste record avec 31 noms d’athlètes suspendus, issus de neuf pays différents, c’est la publication effectuée fin février par l’Athletics Integrity Unit. Mais ce sont surtout deux pays qui « alimentent » cette liste : l’Inde, avec 12 athlètes, et la Russie, avec 9 athlètes.
Une nouvelle confirmation que l’Inde est confrontée à une vraie épidémie de dopage, avec actuellement un total de 78 athlètes suspendus. La plupart affiche un petit niveau de performance, et ne figure pas dans la base statistiques de référence qu’est Tilastopaja.
Côté Russie, rien de nouveau non plus ! Les sanctions frappent des athlètes âgés, retraités et qui ont souvent déjà été suspendus par le passé. Elles font suite à l’exploitation des données collectées par l’Agence Mondiale Anti-Dopage durant son enquête sur le dopage institutionnalisé en Russie. Elle portait sur 298 sportifs russes et l’AMA avait identifié 145 cas de manipulation de données. C’est en 2020 que les dossiers ont été transmis aux différentes fédérations internationales, et depuis, des sanctions successives ont été prises, du moins côté athlétisme.
Anastasia Kapachinskaya, championne du monde 2003, 3ème suspension à 43 ans !
Avec un décalage énorme entre les dates des infractions et les suspensions : les manipulations remontent à 2012, et les sanctions tombent 11 ans plus tard ! Et comble, entretemps, les athlètes ont souvent déjà été suspendus pour des contrôles positifs. Exemple, et non des moindres, avec Anastasia Kapachinskaya : championne du monde du 200 m en 2003, elle a été suspendue pour stanozolol entre 2004 et 2006, puis pour testostérone entre 2016 et 2020. Mais sa carrière est définitivement derrière elle, elle n’a plus couru depuis 2013, et elle a maintenant 43 ans ! Et pourtant, elle reçoit une nouvelle suspension de 2 ans qui s’achèvera en 2025…
Dans cette longue liste de 31 ans, près de la moitié concernent des infractions qui datent d’avant 2021, et arrivent donc bien tardivement. Avec une exception très dérangeante : la toute jeune Biélorusse Nadzeya Launikevich, lanceuse de javelot, déjà positive à 17 ans au hydrochlorothiazide, un diurétique !
Nazar Kovalenko, très proche de Bertrand Moulinet
Le cas du marcheur ukrainien Nazar Kovalenko, lui, ne pourra que choquer la communauté des marcheurs français. Il reçoit une deuxième suspension, cette fois de 8 ans, après un contrôle positif au stanozolol au printemps 2022. Il avait effectué en 2021 son retour après une première interdiction entre 2017 et 2020.
En 2014, Nazar Kovalenko avait été licencié à Amiens et il était aussi l’un des habitués de Font Romeu à l’époque où Bertrand Moulinet s’y préparait. Les deux hommes étaient très proches. Le jeune Français allait y voir sa carrière stoppée au printemps 2015, sur un contrôle positif au FG4592. Il avait alors adopté une attitude inédite en reconnaissant immédiatement son dopage, mais avait refusé de livrer des informations sur ses fournisseurs. Officiellement, Bertrand Moulinet avait affirmé avoir obtenu les produits dopants retrouvés à son domicile, par des commandes sur des sites internet en Ukraine. Il soutenait avoir été cherché lui-même les produits dans ce pays, qui est justement celui de sa compagne de l’époque, devenue depuis son épouse, elle-même une marcheuse de bon niveau.
Après cette affaire, Bertrand Moulinet avait définitivement stoppé la marche, sans même envisager de come back. Nazar Kovalenko, lui, avait suivi le chemin inverse, revenant à la compétition en 2021, mais les autorités anti-dopage le surveillaient visiblement de près, puisque c’est un contrôle hors compétition effectué en Turquie en février 2022, quelques jours avant l’invasion de la Russie, qui a provoqué sa chute.
> Texte : Odile Baudrier
> Photo : DR