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Sierre Zinal, une polémique autour d’ex-dopés

La classique Sierre Zinal a vu ses records battus par Kilian Jornet et Maude Mathys, mais la communauté du trail s’est émue en découvrant la présence parmi l’élite de trois coureurs.ses précédemment impliqués dans des affaires de dopage.

Trois ex-dopé.es à Sierre Zinal. L’information a rapidement circulé dans la communauté du trail après cette édition marquée par la grosse performance de Kilian Jornet, qui éclipsait de quatre minutes la marque précédente de Jonathan Wyatt, vieille de 16 ans. Or le Néo-Zélandais valait cette année-là 27’56’’ sur 10000 m et 2h13’ sur marathon. C’est sur cette distance qu’il disputait l’année suivante les Jeux Olympiques, après avoir été présent en 1996 sur 5000 mètres.

Des références qui situent le niveau de performance de Kilian Jornet, qui améliorait à cette occasion son propre record de plus de six minutes. Et l’Espagnol justifiait son gros progrès par un ralentissement de son rythme de compétitions : il ne disputait en Suisse que son deuxième trail de la saison, lui qu’on retrouvait en général sur plus de 15 épreuves chaque année.

Positive à cause d’un traitement contre l’infertilité

Maude Mathys a, elle aussi, réalisé le doublé victoire+record, torpillant l’ancienne référence de près de six minutes. Mais la Suissesse de 32 ans, qui compte trois titres de championne d’Europe de course de montagne, s’est retrouvée au cœur d’une polémique autour du dopage. En 2015, la jeune femme a été contrôlée positive au clomiphène, un médicament destiné à traiter l’infertilité, mais interdit par les règles de l’anti-dopage. Compte tenu de ce contexte, elle s’était vue alors sanctionnée par un simple avertissement, et l’annulation de ses résultats aux Championnats du monde de ski-alpinisme 2015.

Toutefois cette affaire bégnine ne passait pas inaperçue cette année à Sierre Zinal, avec la découverte de deux autres ex-dopés présents dans la course, l’Erythréen Petro Mamu, 2ème derrière Kilian Jornet, battant lui aussi l’ancien record de l’épreuve, et l’Italienne Elisa Desco, 7ème.

Positif par un médicament contre la bronchite,

Petro Mamu renouait avec Sierre Zinal, qu’il avait remporté en 2016, et où il avait terminé 4ème en 2017. Un résultat annulé par la suite en raison de son contrôle positif survenu lors du championnat du monde de course de montagne, où l’on retrouvait du Fénotérol dans son échantillon, un médicament destiné à soigner l’asthme et interdit par l’anti-dopage en raison de son impact sur la performance, favorisée par l’amélioration de la fonction respiratoire.

L’Erythréen, qui venait de remporter le titre mondial, soutenait l’avoir absorbé à cause d’une bronchite. Une explication acceptée par l’IAAF acceptait, et la suspension était seulement de neuf mois.

De la CERA pour l’Italienne Desco

C’est pour de l’EPO-CERA que l’Italienne Elisa Desco s’était vue interdite de compétition pendant deux ans, en 2009, après un contrôle lors du championnat du monde qu’elle venait de finir avec le titre. Toutefois, Elisa Desco a toujours contesté avoir utilisé la CERA, entamant une longue procédure pour faire reconnaître une erreur matérielle lors des prélèvements, sans obtenir gain de cause.

Après un arrêt de trois années, elle renouait avec la victoire lors du Championnat du Monde de Sky Running en 2014, mais son retour dans le monde du trail avait été très tumultueux lors de The North Face 50 miles à San Francisco fin 2015. Une vive polémique était apparue pour l’inciter à ne pas prendre le départ de cette épreuve richement dotée, qu’elle allait finalement abandonner.

Quatre ans plus tard, son passé a à nouveau ressurgi en Suisse, et c’est à nouveau des Etats-Unis qu’est apparue la plus réaction la plus hostile face à la participation de ces ex-dopés, celle de l’ultra runneuse Camille Herron, qui n’a pas hésité à faire part de son irritation : « Pour un sport qui a peu de tests en compétitions, et où les tests hors compétition n’existent pas, c’est vraiment un mauvais signal. » Sans oublier aussi qu’aux Etats-Unis, très rares sont les trails à pratiquer des contrôles anti-dopage…

  • Texte : Odile Baudrier
  • Photo : D.R.