Renelle Lamote a disputé le Championnat de France de cross court, elle y termine 11ème. Un choix inédit que le cross pour ce gros talent du 800 mètres mondial, imposé par des problèmes de blessure, mais qui a donné très envie à cette battante de revenir l’année prochaine pour l’emporter…
Sa fin de course a été un peu laborieuse, son physique traduit sa souffrance. Mais après l’arrivée, Renelle Lamote retrouve vite sa pointe d’humour pour souffler : « J’ai regretté de n’avoir personne pour me battre dans la dernière ligne droite ».
Le terrain n’est plus la piste, l’état d’esprit demeure le même, celui d’une combattive qu’on a vue à l’œuvre toute la saison dernière pour se propulser dans les leaders mondiales du 800 mètres avant de connaître une immense désillusion au Jeux Olympiques de Rio avec l’élimination dès le premier tour.
L’épisode n’est pas oublié, Renelle Lamote n’aime pas l’aborder publiquement, mais elle a su l’évoquer avec son entraîneur Thierry Choffin, qui confirme « Oui, on en a parlé. Pas tout de suite. Plus tard ». Et de souligner : « Digérer un échec aux JO à 22-23 ans, ce n’est pas facile ».
D’autant qu’il s’y ajoutait une blessure au pied, avec une aponévrosite récalcitrante qui a aussi eu une influence néfaste sur la préparation d’avant JO et qui s’est poursuivie tout l’hiver, retardant le moment de la vraie reprise de Renelle.
Les spécialistes du 800 mètres aiment rarement le cross
C’est à cause de cette aponévrose douloureuse que la jeune athlète s’est retrouvée à arpenter les parcours de cross cet hiver, à défaut de pouvoir s’exprimer en indoor. Pour son plus grand bonheur : Renelle Lamote a pratiqué le cross dès ses débuts. Cette discipline l’a toujours séduite, au contraire de beaucoup de spécialistes du double tour de piste. Thierry Choffin l’admet : « Oui, c’est assez rare. Mais elle est atypique car elle est forte là-dedans et elle aime ça. Beaucoup de coureurs de 800 m détestent le cross, comme Pierre Amboise Bosse. Renelle en a fait depuis toute petite. Je pense que c’est là qu’elle a forgé une partie de sa force de caractère ». Cette force qu’elle a su mobiliser pour franchir les étapes vers le très haut niveau mondial et à nouveau aller puiser au plus profond pour gommer sa déception brésilienne.
Le cross l’y a aidée. L’indoor lui était interdit, sa préparation tronquée ne lui aurait pas permis de s’approcher de ses records. Toute la fin d’année, elle a dû se limiter à de la simple condition physique, de la piscine, de l’entretien physique, mais pas de PPG ou de course, et ce n’est que le 8 janvier en stage au Portugal qu’elle a pu reprendre timidement la course à pied. Elle n’a ainsi chaussé les pointes que deux fois cet hiver, pour les interrégions et pour ce France. Dans ces conditions, il n’était pas réaliste de s’imaginer la voir évoluer en salle.
Le cross s’est imposé comme une alternative. Thierry Choffin parle d’un « choix par défaut » qu’elle a accueilli avec enthousiasme : « Ca me fait plaisir, ça me rappelle mes jeunes années ». Renelle explique : « Il me fallait un challenge pour l’hiver ». L’entraîneur explicite : « On s’est dit qu’elle allait faire le cross avec les autres filles pour la maintenir sous objectif, car c’est une fille qui a besoin d’avoir des objectifs pour s’investir».
Un choix de raison, et le bonheur d’être dans une super équipe
Renelle évoluant au quotidien à Fontainebleau aux côtés de quelques-unes des meilleures jeunes spécialistes de cross en France avec Joanna Geyer Carles, de Aisse Sow, Emma Oudiou, ce choix s’inscrivait dans une vraie logique.
Surtout qu’il crée un contexte très particulier pour Renelle, qui évolue ainsi dans un groupe où elle n’est pas la meilleure, et Thierry Choffin souligne combien cette situation lui a été bénéfique : « Oui, ça l’a énormément aidée. Ca lui donne un but, sans trop de pression, car ce n’est pas sa spécialité. Elle n’aurait pas pu faire ça toute seule. L’équipe l’a poussée. »
Le discours est le même chez Renelle qui confie avec entrain : « J’ai une pression de l’équipe, mais je ne suis pas un des piliers de l’équipe ». Pourtant à St Galmier, elle ne démérite pas vraiment, avec sa 11ème place au scratch, et 3ème de l’équipe qui devient championne de France. Mais avec son ambition de se placer dans le top 10, elle ne dissimule pas une certaine déception : «Je n’étais pas armée pour aller jusqu’au bout », et son coach souligne : « C’est une battante, elle se voyait faire un peu mieux. » Tout de même, ce France de cross court lui a donné faim, et à peine arrivée, elle se plaît à répéter qu’elle aimerait bien devenir championne de France de cette spécialité dans le futur…
Thierry Choffin sourit et livre : « C’est elle, elle s’enflamme. Elle dit si je n’ai rien, je m’entraîne et je gagne. Oui, elle a tout pour le faire, c’est à sa portée. Mais on verra l’année prochaine, elle peut faire du 800 m en salle ».
Et d’ici là, l’été devrait fournir de nouvelles belles démonstrations de force de Renelle….
- Texte : Odile Baudrier
- Photo : Gilles Bertrand