La diffusion du documentaire de la BBC n’en finit pas de susciter des réactions énormes aux Etats-Unis et à travers le monde entier. Alberto Salazar et Galen Rupp, ont réagi pour démentir les allégations de leur implication dans le dopage relayées dans ce sujet fourmillant d’informations. Nike se voit égratigné dans plusieurs témoignages.
Avec un sujet d’une telle teneur que celui réalisé par Mark Daly et David Epstein, les angles d’intérêt ne manquent pas. Le duo a rencontré de nombreux interlocuteurs pointant du doigt les méthodes d’Alberto Salazar, et leur utilisation par Galen Rupp, en particulier.
Dans ces entretiens, Nike se voit égratigné de manière forte à deux reprises. Par un premier témoignage d’un certain Mike. Cet ancien athlète du NOP (Nike Oregon Project) ne dévoile ni son identité, ni son visage. Il affirme qu’un ancien médecin appointé par Nike, le Docteur Loren Myhre, lui aurait conseillé d’utiliser de la testostérone, comme le faisait régulièrement Alberto Salazar à ses athlètes.
« Mike » conseillé par le médecin du laboratoire Nike
Ce fameux « Mike » aurait sollicité conseils en 2007 auprès du Docteur Loren Myhre, suite à une baisse de forme, et celui-ci l’aurait orienté vers un endocrinologue travaillant avec Alberto Salazar, pour prescrire à ses athlètes de la testostérone et des médicaments pour la thyroïde. Et le docteur Loren Myrhe lui aurait expliqué que les doses prescrites étaient trop faibles pour être détectées par les contrôles.
Le docteur Loren Myrhe, décédé en 2012 à l’âge de 75 ans, avait effectué sa carrière au sein de l’US Air Force, avant d’être recruté par Nike pour développer un programme de recherche sur la physiologie au sein du Nike Sports Research Lab. C’est à ce titre qu’il collaborait avec les membres du NOP, le Nike Oregon Project.
Toutefois quel crédit accorder à de tels propos révélés de manière anonyme, mettant en cause un chercheur réputé ???
L’analyse de Galen Rupp dans le laboratoire Nike
Mais un autre témoignage apparaît beaucoup plus embarrassant pour Nike. Celui de Steve Magness, qui est l’homme clef de cette affaire. Le jeune entraîneur, il n’a que 30 ans, a été le bras droit d’Alberto Salazar, pendant 1 an et demi, qui l’avait recruté pour l’épauler dans le coaching. Mais Steve Magness a très rapidement découvert une face cachée de Salazar et de son groupe d’entraînement qui l’a incité à sortir du NOP.
Steve Magness, lui, témoigne à visage découvert, malgré ses inquiétudes, et il a d’abord fait part de ses découvertes au WADA, l’agence mondiale anti-dopage, avant de se prêter aux questions du duo des journalistes.
Parmi ses révélations, l’une des plus choquantes est celle que Galen Rupp utilisait de la prednisone (corticoïde) et testostérone dès l’âge de 16 ans, et c’est à partir d’une analyse réalisée dans le laboratoire Nike qu’il aurait découvert cette pratique. Pour étayer ces faits, il s’appuie sur la photo du graphique des résultats de l’analyse effectuée en 2002 et sur lequel figure la mention de cette utilisation.
Alberto Salazar élude les questions de Steve Magness
C’est en travaillant à la demande d’Alberto Salazar sur des documents du Laboratoire Nike compilant plusieurs années de tests sanguins d’athlètes du projet que Steve Magness aurait découvert cette analyse et son très douteux commentaire.
Le jeune entraîneur, très choqué par cette information, et après avoir sollicité le conseil de ses parents, interrogeait Alberto Salazar pour qu’il s’explique. Celui-ci pointait du doigt le Docteur Loren Myhre, l’accusant d’avoir commis une erreur d’identification, en raison de troubles liés à sa maladie. En effet, le docteur Loren Myhre souffrait de la SLA, la sclérose latérale amytrophique ou Maladie de Charcot, qui a causé son décès en 2012. Toutefois l’analyse douteuse remontait à 2002, et le docteur Myhre n’était pas alors atteint par cette pathologie.
Alberto Salazar et Galen Rupp ulcérés par les sujets
A la suite de la diffusion du documentaire sur la BBC et de la publication du sujet sur Pro Publica, de très nombreux commentaires ont été effectués. En premier bien sûr ceux d’Alberto Salazar et Galen Rupp, qui dans deux textes très sibyllins et quasi identiques contestent le travail des journalistes et insistent sur leur parfaite droiture pour « un sport propre ». De très nombreux athlètes ont également réagi, et la presse britannique et américaine, en particulier, s’est fait un large relais de ces informations.
Aucune réaction officielle n’a été dévoilée par Nike, qu’on imagine évidemment très embarrassé de se voir ainsi mis en cause à travers son projet NOP que la marque a porté pour booster le demi-fond US, et qu’elle a appuyé sur Alberto Salazar, un ami de longue date de Phil Knights.
- Texte : Odile Baudrier
- Photo : Gilles Bertrand