Muriel Hurtis a achevé sa carrière l’année dernière à 35 ans, après deux décades passées sur la piste, où elle accumule les performances, entre son titre de championne du monde junior, de championne d’Europe, championne du monde en salle. Elle fêtera fin juin son jubilé avec sa « Caraïbes Race ».
Muriel a disputé son ultime course l’année dernière au Championnat d’Europe, dans le relais 4 fois 400 mètres, et d’un coup, la piste n’est plus devenue qu’une abstraction pour elle. Muriel Hurtis a ainsi tourné le dos à deux décades centrées exclusivement autour de la performance.
Elle a brillé d’entrée, accumulant les titres de championne de France, puis vice-championne d’Europe junior du 200 m en 1997, et surtout Championne du monde junior du 200 mètres à 19 ans. Cette victoire sur la piste d’Annecy a marqué un sérieux virage : « Cela a été un déclic pour moi. Avant, je faisais du sport seulement pour m’amuser. Là, j’ai pris conscience des choses. Ce moment est un tournant dans ma carrière. »
Une carrière qu’elle veut analyser avec lucidité : « J’ai connu beaucoup de déceptions sportives. Tous ces échecs m’ont servi à rebondir. J’ai été conditionnée à me battre. »
Et ce sens du combat ne l’a jamais quittée à travers les années. Après des Jeux Olympiques de Sydney décevants (elle sort en demi-finale), il lui a permis de se mobiliser pour retrouver l’or pour le Championnat d’Europe de 2002, et le Championnat du Monde en salle 2003. Et de s’attaquer à une ré-orientation très inédite avec le passage sur 400 mètres à partir de 2010, elle disputera ainsi deux Mondiaux et les JO de Londres dans le relais 4*400 mètres, et plusieurs championnats d’Europe sur le tour de piste.
Muriel s’affirme par-dessus tout comme une compétitrice, et une gourmande de réussites, et elle souligne : « Pendant ma carrière, j’ai eu des baisses de motivations. Mais ça ne durait pas. La passion reprenait le dessus. Mon esprit de compétitrice et mon envie de réussites revenaient vite. J’ai toujours su rebondir. »
Un come back difficile après sa maternité
Comme après la naissance de son petit Lehyan, il y a 10 ans. Le come back fut compliqué et elle ne put le réussir qu’avec l’aide de Jacques Piasenta, qu’elle sort de sa retraite pour l’épauler : « Cela a été une étape de ma vie qui m’a forgé le caractère. Malgré les difficultés, je n’ai pas baissé les bras ! »
Elle a conservé cette attitude volontariste pour aborder sa « retraite » sportive. Elle l’anticipe parfaitement, et reprend le chemin des études à l’âge de 33 ans ! Le challenge est grand, elle élève seule son enfant, et s’entraîne quotidiennement : « Cela n’a pas été facile. Mais le sport m’a donné le mental pour ne pas lâcher. » L’ancienne étudiante en psychologie a obtenu son diplôme de psychomotricienne, un métier qu’elle adore : « Mon corps a été mon outil de travail pendant 20 ans. Là, j’utilise le corps des autres. Je les aide à se sentir bien dans leur corps, chaque patient est particulier. »
Ces choix lui ont permis de franchir la transition de l’après-carrière sans trop de difficultés, même si elle avoue : « En fait, cela manque de ne plus aller au stade tous les jours. Surtout il manque la recherche de la performance, l’effort physique, la douleur qu’on ressent en séance et qu’on est heureux de surmonter. Et aussi l’ambiance de retrouver les amis du groupe. »
La Guadeloupe, une île qu’elle adore
Ce petit vide l’a amenée presque naturellement vers un nouveau projet, celui d’une course qu’elle organisera fin juin pour marquer son jubilé, avec l’ambition d’allier ses deux univers préférés, l’athlétisme et les Caraïbes, d’où cette Guadeloupéenne est originaire.
Muriel s’est impliquée de longue date dans des évènements caritatifs s’appuyant sur la course à pied, en faveur en particulier d’ELA, elle en est la marraine depuis 15 ans. Le monde du running sur route l’a toujours séduite, par sa capacité à rassembler haut niveau, experts et néophytes : « C’est un environnement sympa. »
Pour la Caraïbes Race, elle ajoutera une touche haut niveau, de nombreux sportifs de renom seront présents en spectateurs ou coureurs, et un don très spécial, destiné à aider un jeune sportif d’Outre Mer, pour faciliter son adaptation à la métropole.
Une manière très originale de marquer son jubilé, pour un clap définitif sur la piste, mais surtout pas dans le sport, Muriel a maintenant basculé dans le clan des runners sur route. On la retrouvera dans le peloton de sa « Caraïbes Race » sans pointes et sans reproches.
- Texte : Odile Baudrier
- Photos : D.R.