Matthew Centrowitz remporte à nouveau le titre national sur 1500 mètres, en dominant outrageusement ses rivaux. Le jeune athlète, membre du groupe d’Alberto Salazar, voulait ainsi démontrer son soutien à son entraîneur, et conserver le cap fixé, s’inscrire dans la continuité de la carrière de son père…
« Like Father. Like Son ». Matthew Centrowitz arbore sur son buste la ligne directrice de sa vie, marcher sur les traces de son père Matt. Matthew, génétiquement programmé pour faire scintiller le patronyme de Centrowitz bien au-delà de son géniteur, dont le palmarès se limite à une double sélection aux Jeux Olympiques, une victoire aux Jeux Panaméricains en 1979, quatre titres nationaux sur 5000 m, et une 5ème place au Mondial de cross juniors en 1974.
Matthew, lui aussi, a brillé dès la catégorie junior, mais sa réussite a pris une dimension toute autre, il devient médaillé de bronze au Championnat du Monde à 21 ans seulement, en 2011, puis se hisse en argent au Mondial 2013, tout en butant sur le podium des Jeux Olympiques de Londres, 4ème seulement.
Pour ses études, Matthew a également suivi la voie de son père, pour prendre le chemin de l’Université d’Oregon. Peu importe que Matt assume la fonction d’entraîneur à l’American University à Washington, Matthew a opté pour Eugene, la référence ultime pour le demi-fond aux Etats-Unis. Avec une nouvelle démonstration de l’omniprésence des Oregon Ducks lors de ces championnats US où la moitié des athlètes de la finale du 1500 m arboraient le maillot vert et jaune couvert du gros « O »…
Matthew, professionnel depuis 2011
Matthew demeure étroitement lié à l’Université d’Oregon, mais n’enfile plus ce maillot mythique depuis longtemps. Dès la fin 2011, il avait fait le choix d’un statut professionnel, évidemment sous les couleurs de Nike, et devenait ainsi membre du groupe d’Alberto Salazar, aux côtés de Galen Rupp, son compagnon de chambre à l’Université. Un duo mis à l’index par les accusations de dopage formulées ces dernières semaines, mais Matthew Centrowitz n’a cure de telles allégations pointant sur Alberto Salazar, un ami de très longue date de son père.
Cette colère qu’il a ressentie à l’encontre des accusateurs de son coach et de son ami, il avait décidé de la déverser sur la piste de Hayward Field pour cette finale du 1500 mètres qu’il a littéralement torpillée. La victoire ne lui suffisait pas, il recherchait un coup d’éclat, en forme de réponse à l’injustice qu’il ressent à voir son groupe du Nike Oregon Project attaqué de la sorte. A tort, répète-t-il à l’envie, tant il est affirmatif pour souligner n’avoir assisté à aucune des dérives pointées par les détracteurs du team.
Sa détermination a éclaté après 900 mètres de course, il place une accélération brutale qui le propulse vers la victoire en 3’37’’25, et surtout avec une avance de 1’50’’ sur ses rivaux, la plus importante enregistrée dans un championnat national US depuis 2004…
Matthew rêve d’un titre à Beijing
L’art et la manière. Matthew Centrowitz a confirmé ce qu’il savait sur la ligne de départ, il était le plus fort et le plus rapide. Le jeune athlète a choisi lui-même le plan suivi, comme l’explique à Ken Goe le journaliste de l’Oregon, Alberto Salazar s’étant contenté de lui asséner : « Où que tu démarres, fais un 200 mètres rapide, et le 200 mètres suivant encore plus vite. »
Matthew a suivi à la lettre la consigne de son maître. Le signal envoyé est fort, et déjà, se profile l’envie d’un titre mondial à Beijing. Même si son chrono de 3’37’’25 ne le place qu’au 37ème rang mondial cette saison, et ne correspond même pas au minima IAAF exigé, de 3’36’’20.
Toutefois il reste encore quelque temps à l’athlète pour dévoiler ses cartes, son apothéose s’était produite à Monaco l’année dernière avec son record de 3’31’’09, il y avait confirmé son come back au plus haut niveau après un hiver tronqué en raison d’un problème cardiaque dû à un virus.
Cette saison, ce n’est pas du côté du physique qu’est apparue une perturbation, mais Matthew a confirmé un mental en acier pour garder le cap de son adage « Tel père, tel fils »…
> Texte : Odile Baudrier
> Photo : DR et Gilles Bertrand