L’analyse de l’échantillon B du prélèvement urinaire de Mouhamadou Fall a révélé la présence d’octodrine, à l’identique de l’échantillon A. Une confirmation somme toute logique, tant il est rare que les résultats de l’échantillon B divergent de ceux de l’échantillon A, comme l’a également vécu le footballeur Paul Dogba. Peu de sportifs peuvent se targuer d’avoir obtenu l’arrêt des poursuites sur cette base. L’Australien Peter Bol et le Kenyan américain Bernard Lagat en font partie. Mouhamadou Fall, lui, s’achemine maintenant vers une suspension de deux ans.
Pendant quelques semaines, Mouhamadou Fall a probablement espéré très fort pouvoir échapper à la suspension promise après un contrôle positif. Le sprinter et ses avocats avaient déposé une demande pour que l’échantillon B du prélèvement effectué fin juillet au Championnat de France démente l’échantillon A où avait été retrouvé de l’octodrine, un stimulant cardiaque figurant sur la liste des produits interdits.
Le footballeur Paul Dogba avait vécu la même situation cet automne : un échantillon A où on découvre de la testostérone, une demande de contre analyse, et un échantillon B qui confirme l’utilisation du produit interdit. Avec la justification pour Paul Dogba, que la testostérone était contenue dans un complément alimentaire acheté aux Etats-Unis.
L’analyse de l’échantillon B aux frais du sportif
Les cas Fall et Dogba se situent dans la lignée d’une très majorité d’autres contrôles où les deux échantillons concordent parfaitement. Peu de sportifs ont vu la contre-analyse leur être profitable. D’abord parce qu’une petite minorité de sportifs demandent à voir leur échantillon B revenir dans un laboratoire anti-dopage. La première raison est un certain réalisme de leur part : ils savent avoir utilisé un produit interdit, et ne peuvent donc avoir aucun espoir de différence entre les deux échantillons… Une deuxième raison, plus triviale, peut être avancée : l’analyse de l’échantillon B est effectuée aux frais du sportif. Pour une somme tournant autour des 300 euros.
En son temps, Hassan Hirt et son avocat, Stéphane Mesones, spécialiste des procédures anti-dopage, avaient cru pouvoir trouver une faille dans la procédure visant le demi-fondeur pour contrôle à l’EPO. Le duo avait plaidé que les droits de l’athlète avaient été bafoués, et qu’il ne pouvait être coupable, car n’ayant pas vu ses 2èmes échantillons confirmés comme positifs. Toutefois, cet argumentaire fallacieux avait été rejeté par le Conseil d’Etat qui avait estimé que l’analyse n’avait pas été effectuée faute du paiement des frais par Hassan Hirt.
Bernard Lagat et Peter Bol, deux contrôles EPO démentis par l’échantillon B
En athlétisme, deux cas sont demeurés dans les annales pour une distorsion échantillon A et B. Celui de Bernard Lagat, en 2003, alors de nationalité kenyane. Et tout récemment, celui de l’Australien Peter Bol. Paradoxe ou pas, les deux échantillons A contenaient de l’EPO, que l’échantillon B ne retrouvait pas. Autre paradoxe, la défense des deux athlètes s’était structurée autour de James Templeton, leur manager commun. Avec pour Peter Bol, un soutien de poids, celui de l’avocat américain Paul Greene, redoutable dans toutes les affaires anti-dopage.
Mais Mouhamadou Fall n’a pu s’inscrire dans cette lignée et la porte d’une éventuelle annulation de la procédure s’est fermée. Lors de son contrôle au France d’Albi, où il avait remporté le titre, le sprinter venait juste d’en terminer avec une longue bataille juridique avec l’AFLD, suite à une procédure lancée à l’été 2022 pour trois manquements aux obligations de localisation. La commission des sanctions avait adopté une position qui lui était très favorable, en estimant que le 3ème manquement ne pouvait être retenu contre lui. Mouhamadou Fall avait alors pu réintégrer l’Equipe de France pour disputer en août le Mondial de Budapest, où il sortait dès les séries. Un mois plus tard, tombait l’annonce de son contrôle positif.
L’avenir du sprinter s’est définitivement assombri, avec en perspective, au minimum deux ans pour ce contrôle positif. Et peut-être plus si le Conseil d’Etat donne raison à l’AFLD, qui a fait appel e la relaxe prononcée par sa commission des sanctions en juillet. Les appels de l’AFLD ont rarement été déboutés par le Conseil d’Etat, à l’instar des affaires Calvin et Boxberger.
- Analyse : Odile Baudrier
- Photo : D.R.