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Le retour de Shelby Houliban divise les fans d’athlétisme aux États-Unis

Après 4 ans de suspension pour dopage, l’Américaine Shelby Houliban retrouvera la compétition début février. Son retour n’a pas manqué de susciter des réactions contrastées chez les amateurs américains d’athlétisme à l’image de celles suscitées par l’annonce de son dopage en 2021. Shelby Houliban a toujours protesté de son innocence, et les médias américains ont souvent adopté une position ambiguë à son égard.

Un documentaire dédié à Shelby Houliban et à son retour après 4 ans de suspension pour dopage. C’est l’idée de la chaîne Flo Track pour marquer la fin de la sanction de la jeune femme, qui comptait malgré les meilleures mondiales sur le 1500 mètres, 4ème au Mondial 2019, détentrice du record américain du 5000 mètres lors de sa suspension (14’23’’92).

Et l’initiative n’a pas fait que des heureux chez les amateurs d’athlétisme aux États Unis, choqués de voir un tel focus sur une athlète suspendue pour dopage. Avec une réaction parfois brutale : la résiliation de leur abonnement à cette chaîne payante.

L’épisode confirme l’attitude très ambiguë des médias américains à l’égard du dopage de leurs compatriotes. Toujours prompts à leur trouver des excuses, tellement à l’opposé de leurs habitudes lorsqu’il s’agit de sportifs étrangers.

Son excuse ne résiste pas aux experts

L’affaire Shelby Houliban a été particulièrement significative de cette double attitude. Le patron de l’agence américaine, Travis Tygart, lui-même, a fait preuve de peu de discrétion sur ses doutes sur ce contrôle, qu’il estimait  imputable à une simple contamination.

Le site de référence Lets Run s’est fait le chantre du refus du contrôle positif de Shelby Houliban, à la nandrolone, en décembre 2020. Jusqu’à solliciter le physiologiste sud-africain Ross Tucker pour qu’il valide la justification donnée par l’athlète, d’une contamination par la viande d’un burrito de porc non castré. Mais Ross Tucker a été très explicite : l’excuse n’avait pas de valeur.

Les experts sollicités par la Cour Suprême Suisse, ultime chambre d’appel pour Shelby Houliban, ont été encore plus explicites. Pour eux, il n’y avait pas plus d’une chance sur 10.000 pour qu’un burrito puisse provoquer un contrôle positif à la nandrolone, compte tenu des taux très élevés constatés dans l’échantillon de Shelby Houliban.

Les infractions à sa suspension non sanctionnées

Malgré tout, les sympathies sont demeurées à l’égard de Shelby Houliban durant ces quatre années. Même lorsqu’elle a enfreint de manière répétée les règles de sa suspension. D’abord en poursuivant son entraînement au sein de son groupe Bowerman Nike de Jerry Schumacher. Elle n’hésite pas à partager la piste des athlètes, au motif qu’il s’agit d’une piste privée, appartenant justement à Nike, et en soutenant qu’elle ne fait pas ses séances à leurs côtés, mais en décalage. Pourtant les règles sont draconiennes : un athlète côtoyant à l’entraînement un autre athlète suspendu s’expose lui aussi à une suspension. D’où le départ de la Canadienne Gabriella Debues-Stafford.

Mais Shelby Houliban s’est aussi distinguée sur un autre terrain, celui des compétitions. On la retrouve à deux reprises, en 2022 et 2023, au départ du semi-marathon Okoboji dans l’Iowa, son état natal. Avec encore, petite ambiguïté avec une épreuve non affiliée à la fédération US d’athlétisme, et qui rassemble une toute petite poignée de coureurs. Et là voilà de retour sur la piste à Chicago, en juillet 2023, pour le Beer Mile World Classic.

Un record du monde, entre parenthèses en pleine suspension

Cette fois, elle ponctue même ce mile où l’on boit de la bière, avec un prétendu record du monde ! Elle n’hésite pas à poser avec le maillot de l’équipe USA et le panneau World Record et à l’épingler sur son profil Instagram… Des errements finalement sans aucune conséquence, l’Athletics Integrity Unit ne s’est pas attaquée à obtenir une nouvelle suspension pour violation des règles anti-dopage.

C’est ainsi que Shelby Houliban a traversé 4 années, apparemment sans jamais stopper son entraînement, avec l’ambition de retrouver le haut niveau dès son retour. Elle a maintenant 32 ans, soutient avoir couru seule à l’entraînement en 4’01’’ sur 1500 m et 14’47’’ sur 5000 m, estime que sa forme actuelle la situe en 3’57’’ et affirme haut et fort vouloir maintenant se qualifier pour le Championnat du Monde en salle de mars 25. Sa première compétition programmée le 1er février dans l’Arkansas donnera le ton sur la réalité de sa forme.

Analyse : Odile Baudrier