Le manager Robert Wagner a reçu une suspension de deux ans pour avoir déclaré à des journalistes se présentant comme réalisateurs d’un film qu’il pouvait leur obtenir des produits dopants. L’Autrichien, qui travaillait alors avec Justin Gatlin, s’est ensuite défendu en affirmant avoir menti. Sa sanction s’achève au moment même où elle est décidée.
Mentir et mentir encore. Robert Wagner s’y échine depuis près de trois ans, et probablement depuis bien plus longtemps… Et à ce petit jeu, le manager autrichien s’en sort avec une sanction de deux ans. Soit l’équivalent de sa suspension provisoire débutée en avril 2018.
Mais que reproche-t-on exactement à celui qui a représenté dans le passé Ben Johnson, mais aussi Colin Jackson et Kelly Holmes ? D’avoir affirmé à des journalistes britanniques de pouvoir obtenir très facilement des produits dopants. L’équipe de « The Telegraph » se présentait en réalité comme réalisateurs d’un film sur l’athlétisme, et avait approché Robert Wagner, dans le camp d’entraînement de Justin Gatlin en Floride, pour lui demander conseils afin que leur acteur se transforme en un véritable sprinter.
Celui-ci se révélait très prolixe, pour leur expliquer les produits à utiliser, hormone de croissance et testostérone, et la méthode pour les obtenir. Il se proposait d’amener aux Etats-Unis les médicaments prescrits par un médecin autrichien, avec à l’appui une ordonnance à son nom. Et en contrepartie, la demande d’une somme de 250.000 dollars.
L’enregistrement effectué entre juillet et décembre 2017, avec micro et caméra cachée ne laissait planer aucun doute sur les mauvaises pratiques de Robert Wagner, qui soutenait aussi avec force détails que tous les meilleurs sprinters mondiaux, y compris Justin Gatlin, avaient recours à ces substances.
Dennis Mitchell, mis en cause par les enregistrements
La diffusion du sujet en décembre 2017 allait faire l’effet d’une bombe. Et la première déflagration concernait Dennis Mitchell, l’entraîneur de Justin Gatlin, qui avait abondé dans le sens de Robert Wagner. Le sprinter américain, qui avait été sacré champion du monde quelques mois plus tôt, le limogeait immédiatement. Son ancien passé de dopé, deux fois suspendu, ne lui laissait guère le choix de cet arrêt de collaboration. Du moins officiellement, car les rumeurs n’ont pas manqué depuis pour soutenir que Dennis Mitchell continue à le conseiller
La deuxième secousse se portait sur Robert Wagner. L’Athletics Integrity Unit, qui venait d’être créée quelque mois plus tôt, allait se révéler très offensive contre le manager. En s’appuyant sur la violation de plusieurs règles du code de l’intégrité, en particulier l’honnêteté, et la protection de la réputation de l’IAAF et de l’athlétisme.
Mais ce vieux briscard optait pour une stratégie simple, celle de soutenir qu’il avait en réalité menti aux journalistes britanniques. Il soutenait avoir inventé l’utilisation de produits dopants par Justin Gatlin, et par les autres sprinters, sa proximité avec un médecin autrichien prescripteur de ces substances, son habitude de transporter entre l’Autriche et les Etats-Unis de petits colis remplis de produits dopants… Bref, son argumentaire se résumait en « j’ai menti pour obtenir le « job », transformer un acteur en sprinter ».
A nouveau, Robert Wagner trouvait des éléments forts pour étayer ce concept effarant, comme celui d’avoir déjà dans le passé signalé des éléments douteux aux autorités anti-dopage, comme lorsqu’il aurait découvert dans un hôtel, après le meeting de Linz, une ampoule d’hormone de croissance.
Les remords et les révélations de Robert Wagner
Et il plaidait sa bonne foi pour demander en contrepartie la levée de sa suspension provisoire.
Mais l’Athletics Integrity Unit refoulait la demande à deux reprises. Finalement, Robert Wagner a accepté en ce début avril 2020 un accord sur une suspension de deux ans. Une durée finalement courte, décidée par l’Athletics Integrity Unit, sensible aux remords exprimés par Robert Wagner pour les « mensonges » proférés durant cette interview très particulière, ainsi qu’à sa collaboration avec l’instance anti-dopage.
Robert Wagner retrouve ainsi immédiatement le droit de reprendre son métier de manager. Qu’a-t-il révélé pour obtenir cette peine réduite ??? Et autre question, quels athlètes voudront travailler avec lui ???
- Texte : Odile Baudrier
- Photo : D.R.