Le contrôle positif à l’EPO de Peter Bol a créé un séisme en Australie, où ce jeune athlète d’origine soudanaise était devenu une référence après sa 4ème place aux JO de Tokyo sur 800 m. Il nie toute utilisation de produits dopants. James Templeton, son manager, espère que l’échantillon B disculpera son protégé, comme cela avait été le cas pour Bernard Lagat, en 2003.
« Un système défectueux ». C’est le verdict de l’Australien Peter Bol à l’annonce de sa suspension provisoire pour un contrôle positif à l’EPO d’octobre 2022. Et il n’hésite pas à ajouter « Je suis devenu une victime ».
Face à ce contrôle, l’athlète de 29 ans, qui vaut 1’44’’ sur 800 mètres, a très vite choisi sa stratégie : nier et se plaindre du système anti-dopage. Il répète ainsi à l’envie une méthode très répandue, des Etats-Unis (Shelby Houlihan), à la France (Ophélie Claude Boxberger), en passant par le Kenya (Absel Kiprop).
Avec une équipe de choc en embuscade à ses côtés pour le soutenir dans cette démarche simpliste visant à créer le doute : l’Américain Paul Greene, une référence mondiale chez les avocats pour l’anti-dopage, et l’Australien James Templeton, qui a été le manager de gros talents en demi-fond, David Rudisha, Augustine Choge, Japheth Kimutai, Bernard Lagat…
Bernard Lagat, privé du Mondial 2003, puis blanchi
Un Bernard Lagat qui avait été, lui aussi, mis en cause pour un contrôle positif à l’EPO. C’était en 2003 durant un stage en Allemagne, dans la base établie pour son groupe par James Templeton, que le prélèvement avait été effectué sur l’athlète, alors encore de nationalité kenyane, et parmi les meilleurs mondiaux sur 1500 mètres (3ème aux JO 2000, et record à 3’26’’34). L’affaire avait éclaté à la veille du Championnat du Mondial de Paris, Bernard Lagat venait juste d’annoncer son forfait, officiellement pour une grippe.
Deux mois plus tard, la surprise était très grande d’apprendre que l’échantillon B ne révélait finalement pas la présence d’EPO. Un contre résultat très rare !
Les plus « anciens » de l’athlétisme se rappellent combien James Templeton avait déployé d’énergie autour de ce contrôle pour conserver une image positive de Bernard Lagat, et entretenir le doute autour des méthodes de l’anti-dopage. Le manager a reproduit pour Peter Bol la même stratégie, et la presse australienne enfourche sans ciller cette version très favorable à l’athlète.
Paul Greene, avocat anti-dopage
A 50 ans, Paul Greene s’est fait, lui, une spécialité de l’anti-dopage, au sein de son cabinet de Portland dans le Maine, et on le retrouve dans de gros dossiers, comme les Jamaïcains Asafa Powell et Sherone Simpson, Caroline Maher… Il était également le conseiller de Shelby Houlihan. Sur ce dossier, sa tactique n’a pas payé, le Tribunal Arbitral du Sport a confirmé la suspension de la recordwoman américaine du 1500 et 5000 m.
Malgré tout, il conserve le même axe de travail : instiller le doute. Et il va même jusqu’à remettre en cause les compétences des laboratoires anti-dopage, en soutenant que l’échantillon ne contient qu’un tout petit peu d’EPO, et que l’interprétation des tests peut être très différente entre les scientifiques…
L’avenir en dira plus, dès le 1er février, l’échantillon B sera analysé. Mais d’ores et déjà, Peter Bol a admis que la procédure prendra du temps. Et aussi beaucoup d’argent : le budget des frais d’avocats et d’experts devrait s’élever à 250.000 dollars !
- Texte : Odile BAUDRIER
- Photo : D.R.