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Lamine Diack sera jugé en janvier 2020 à Paris pour corruption

Lamine Diack sera jugé en janvier 2020, pour les accusations de corruption durant sa fonction de président de l’IAAF. Le tribunal correctionnel de Paris s’attaque à cette énorme affaire qui a retenti sur l’athlétisme mondial, mais les prévenus seront quasiment tous absents, excepté les résidents français, le docteur Gabriel Dollé, l’avocat Habib Cissé. Plusieurs avocats français de renom seront en action, pour représenter les témoins assistés, ou les parties civiles, l’IAAF, le CIO, l’AMA. Seules deux athlètes ont demandé à être reconnues comme victimes de cette corruption, les Françaises Christelle Daunay et Hind Dehiba.

Une affaire mondiale à l’épicentre français. C’est en janvier 2020, que le destin de Lamine Diack se jouera, durant ce procès inscrit à l’agenda du tribunal correctionnel de Paris du 13 au 23 janvier. Avec une prévision de six demi-journées pour débattre des responsabilités des six personnes mises en cause pour corruption et blanchiment aggravé, Lamine Diack, Papa Massata Diack, son fils, Habib Cissé, son avocat, le docteur Gabriel Dollé, les Russes Valentin Balakhnitchev et Alexei Melnikov. Mais on sait déjà que les deux Russes, et le Fils Diack pointeront au rang des absents à Paris.

Enfin ! C’est le mot utilisé par Lamine Diack à l’annonce de la date de son procès. L’ancien Président de l’IAAF s’est confié à « Jeune Afrique » pour exprimer ses sentiments après un très long silence. Et pour lui, toute cette affaire n’est qu’une injustice à son encontre, qui aurait été orchestrée par son soi-disant rival, Dick Pound, qui a mené l’enquête pour l’AMA.

Lamine Diack nie les magouilles

Car Lamine Diack réfute complètement les accusations de corruption et sert une version beaucoup plus soft des dérives constatées. Selon sa théorie, les problèmes seraient consécutifs aux difficultés financières connues par l’IAAF, il lui fallait redresser les comptes, et réussir financièrement les JO de Londres en 2012 et les Championnats du monde d’athlétisme à Moscou en 2013. D’où l’arrivée de nouveaux sponsors russes, notamment la banque VTB. Au moment même où émergent les informations sur des cas de dopage chez des athlètes russes. C’est dans cette optique que Lamine Diack et sa Team adoptent une stratégie radicale : « Nous ne pouvions pas nous permettre de perturber la réussite de ces deux évènements. Nous n’avons jamais « couvert » leurs cas. Nous avons juste demandé du temps pour vérifier leurs tests et faire en sorte que si sanctions, il devait y avoir, elles prennent effet après ces compétitions. »

La belle époque pour Lamine Diack, au Mondial de Pékin 2015, où Sebastien Coe est élu pour lui succéder. Quelques mois plus tard, il est interpellé à Paris et l’affaire de corruption explose au grand jour !

Une explication qui fait certainement sourire le juge Van Ruymbeke, qui a conclu à des faits de corruption et blanchiment aggravé de Lamine Diack, avec à l’appui, des preuves plus que tangibles, dévoilant des mouvements financiers qui donnent le tournis.


Le fils Diack laisse son père se défendre face aux juges

Et qui se sont largement déversés en faveur de son fils Papa Massata Diack. Mais devant le tribunal, le père Diack ne pourra pas compter sur l’aide de son fils, qui refuse de quitter le Sénégal, pour étayer ses dires. Seuls deux accusés seront là pour donner leur version de cette sinistre affaire, le docteur Gabriel Dollé, et l’avocat Habib Cissé, coupables d’avoir reçu des sommes d’argent en échange de la suppression de contrôles anti-dopage. Tout simplement parce que ces deux-là sont contraints à assister au procès, puisque placés sous contrôle judiciaire.

L’athlétisme mondial aura le regard tourné vers ce tribunal de Paris, où l’on retrouvera quelques avocats de renom, pour défendre les instances officielles qui se sont portées parties civiles, comme maître Jean Michel Darrois, un avocat d’affaires très puissant, chargé des intérêts du CIO, ou Maître Daoud, qui plaidera pour l’Agence Mondiale Anti-dopage, qu’on avait connu en 2006 comme avocat d’Eunice Barber, accusée de violences contre des policiers.

Maître Elise Arfi, défend les témoins assistés

Les témoins assistés (Shobokhov-Aptekin-Cakir-Baranov) ont choisi une femme étonnante pour les représenter, Maître Elise Arfi, qui s’est fait connaître par plusieurs affaires très médiatisées, la défense d’un pirate somalien, du rappeur MHP, et surtout du Libanais Ziad Takieddine, qui accuse Nicolas Sarkozy dans l’affaire du financement par Kadhafi de sa campagne.

En-dehors des instances officielles qui se sont portées parties civiles, seules deux athlètes ont demandé à voir leur préjudice reconnu dans ce procès. Christelle Daunay, pour avoir perdu de grosses sommes d’argent par le dopage de la marathonienne russe Shobukhova, protégée par le duo Diack, et Hind Dehiba, pour avoir été évincée de sélections internationales du fait de minima trop élevés car fixés en fonction de performances mondiales obtenues grâce à la protection d’athlètes dopées. C’est finalement très peu, compte tenu du nombre d’athlètes floué.e.s par cette protection d’athlètes russes et turques.

Le tribunal correctionnel décidera à la fois des sanctions contre les accusés et des dédommagements pour les parties civiles.

  • Texte : Odile Baudrier
  • Photo : Gilles Bertrand et D.R.