Le Tribunal Arbitral du Sport a réduit de 6 mois la suspension de Christian Coleman. L’Américain sanctionné pour 3 no shows pourra reprendre au mois de novembre. Une déconvenue pour l’anti-dopage, avec la toute petite satisfaction que le sprinter, sacré champion du monde à Doha en 2019, est interdit des Jeux Olympiques.
Le coup de poker de Christian Coleman a partiellement réussi. L’Américain gagne 6 mois de suspension. Il sera interdit des Jeux Olympiques de Tokyo (s’ils ont lieu ?). Mais il pourra être présent au Championnat du Monde d’Eugene l’année prochaine. Il pourra ainsi y défendre son titre conquis à Doha en 2019, et devant un public américain peu regardant sur les dérives dopantes.
Cette clémence du Tribunal Arbitral du Sport ne peut qu’heurter les acteurs de l’anti-dopage. Les juges de l’instance suisse n’apparaissent visiblement pas très au fait des méthodes employées par les sportifs malhonnêtes pour contourner les règles.
Et en particulier de leur tactique de gagner du temps entre le moment où le contrôle leur est notifié et celui où ils doivent réellement fournir leur échantillon d’urine ou de sang. Le « washing-out » fonctionne alors à plein pour neutraliser quelques minutes, suffisantes pour diluer les produits interdits injectés.
Jean Pierre Verdy, l’ancien patron des contrôles de l’AFLD, a ainsi bien décrit dans son livre « Ma guerre contre les tricheurs », la méthode utilisée sur le Tour de France, avec des agents de sécurité placés par les équipes dans les halls des hôtels pour informer les managers de l’arrivée des préleveurs. Sans oublier la mauvaise habitude d’inverser les numéros de chambres à la réception de l’hôtel pour que les préleveurs perdent du temps en frappant à la mauvaise porte…
C’est peu ou prou ce que cherchait à faire Christian Coleman, qui a soutenu qu’il était très proche de son domicile lors de son contrôle du 9 décembre 2019, car occupé à faire son shopping de Noël dans un centre commercial voisin, et qu’il suffisait donc au préleveur de lui passer un appel téléphonique pour l’inviter à rejoindre son appartement.
Les juges du TAS ont suivi l’Américain sur ce terrain douteux, en soutenant que le préleveur aurait dû le joindre au téléphone au lieu de simplement patienter et de lui notifier son absence au terme de ce créneau de 60 minutes imposé par les règles.
4 absences en 18 mois
Brett Clothier, le patron de l’Athletics Integrity Unit, n’a pas manqué de réagir à cette relaxe partielle de Christian Coleman, pour confirmer que la méthode officielle ne serait pas revue par l’instance anti-dopage de l’athlétisme, à savoir qu’aucun avertissement d’un contrôle anti-dopage hors compétition ne doit être donné. Et qu’au contraire, il s’agit même d’un élément fondamental du Code Mondial Anti-Dopage.
L’AIU ne peut qu’être excédée par cette deuxième affaire Coleman. Le sprinter avait déjà échappé à une suspension pour 3 no shows, à la faveur d’une bataille juridique. Il avait été disculpé quelques jours seulement avant le Championnat du Monde de Doha. Il y raflait un titre mondial sur 100 mètres à l’odeur de soufre.
Le voilà maintenant avantagé par cette décision du TAS. Il a pourtant compté à son actif 4 absences en 18 mois lors de contrôles : le 6 juin 2018, le 16 janvier 2019, le 26 avril 2019, le 9 décembre 2019. Pas du tout professionnel pour un athlète professionnel ! Mais il est sûr qu’une bonne absence vaut toujours mieux qu’un contrôle positif…
- Texte : Odile Baudrier
- Photo : D.R.