Le refus de la Russie de laisser l’Agence Mondiale Anti-Dopage accéder au laboratoire de Moscou place en grave difficulté l’AMA, critiquée pour son laxisme. Seize agences anti-dopage nationales (dont la France) exigent que de nouvelles sanctions soient prises contre la Russie. Thomas Bach, le patron du CIO, joue, lui, le jeu de la Russie en affirmant qu’elle ne sera, de toute façon, pas bannie pour les JO de Tokyo.
Ne pas tenir ses engagements et recevoir un quitus du patron du CIO. C’est la situation vécue par la Russie, qui a refusé l’accès au laboratoire de Moscou des experts de l’AMA avant la date fixée au 31 décembre 2018. Et qui a reçu un soutien fort de Thomas Bach, soutenant que la Russie a déjà supporté une sanction, lors des Jeux de Pyong chang, et qu’elle sera de toute façon autorisée à disputer les JO de Tokyo, même si l’AMA décidait d’une nouvelle suspension de son agence anti-dopage.
Une prise de position qui a suscité un torrent de réactions choquées dans un contexte déjà marqué par une hostilité forte au laxisme de l’Agence Mondiale Anti-Dopage. Son président Sir Craig Reedie a produit un communiqué au ton peu offensif en réaction à la provocation de la Russie qui a tout fait pour ne pas respecter l’engagement d’autoriser les experts à accéder aux bases de données conservées au laboratoire de Moscou, compilant les contrôles anti-dopage subis par les athlètes de Russie entre 2011 et 2015.
Craig Reedie va-t-il réagir ?
Mais Craig Reedie n’a pas trouvé les bons mots, se contentant de faire part de son « immense déception » de ce blocage voulu par la Russie, qui remet ainsi en cause l’accord du mois de septembre, qui exigeait cet accès en contrepartie de la la levée de la suspension de l’agence anti-dopage russe.
Un blocage visiblement décidé au plus haut niveau de l’Etat russe, puisque le directeur de l’Agence Anti-Dopage de Russie, Yury Ganus, avait imploré à deux reprises le Président Poutine pour qu’il facilite le travail des experts de l’AMA et que la date du 31 décembre soit respectée.
Après cet échec, quelle sera maintenant la décision de l’AMA pour le futur ? La logique pure voudrait que l’agence anti-dopage de la Russie soit à nouveau mise sur la touche. La rumeur a circulé d’une nouvelle date butoir au 15 janvier, mais les réactions ont été très hostiles à ce changement de règles, qui valide une fois de plus la toute puissance de la Russie. Le soutien de Thomas Bach l’a démontré, confirmant ses liens plus qu’étroits, et certainement très suspects, avec Vladimir Poutine…
Le tollé a été énorme, emmené dans un premier temps par Travis Tygar, le patron de l’anti-dopage américain, qui n’a pas hésité à parler d’une « véritable blague et d’une gêne terrible pour l’AMA et pour l’ensemble de l’anti-dopage mondial ». Les réactions hostiles se sont amplifiées au fil des jours, et le 2 janvier, ce sont 16 agences anti-dopage nationales, les NADO, qui se sont unies pour protester et pour exiger une réponse forte de Craig Reedie. La France fait partie des signataires, aux côtés de plusieurs pays européens, de l’Australie, du Japon, et des Etats-Unis.
La partie est loin d’être terminée, et ne peut que susciter une vraie inquiétude pour l’avenir du système anti-dopage mondial.
- Texte : Odile Baudrier
- Photo : D.R.