L’EPO demeure visiblement le dopant préféré des Kenyans. Kipgekyo Bett, médaillé de bronze sur 800 mètres à Londres, s’ajoute à la liste des positifs à ce puissant booster de performances. La création à Nairobi d’un laboratoire anti-dopage accrédité permettra-t-elle de stopper les mauvaises pratiques ???
Les news du Kenya s’entrechoquent. L’actualité du dopage bouillonne dans ce pays où les dérives ne s’interrompent pas. Au contraire. Pour preuve, le cas de Kipyegon Bett. Le médaillé de bronze du 800 mètres de Londres 2017 avait déjà reçu le 15 août une suspension provisoire, pour avoir manqué un contrôle anti-dopage. Une broutille pour certains, n’hésitant pas à considérer qu’un contrôle raté ne correspond pas à du dopage. Mais quelques jours plus tard, l’Athletics Integrity Unit en a rajouté une couche, avec, cette fois, l’annonce du contrôle positif à l’EPO de Bett. Et dire que Kipyegon Bett n’a que 20 ans mais était déjà adepte de l’EPO … Cela s’ajoute au cas de la steepleuse Celliphine Chespol, championne du monde cadette et junior, 19 ans seulement, et mise en cause pour des no shows.
Alors, faut-il conserver encore de l’espoir pour le futur de l’athlétisme du Kenya, malmené par le dopage, la corruption, les managers véreux ??? Peut-être, avec l’annonce de la création à Nairobi du premier laboratoire anti-dopage accrédité en Afrique par l’Agence Mondiale Anti-dopage. Une nouveauté importante puisqu’elle permettra l’analyse des échantillons sanguins dans le cadre du Passeport Biologique. Avec ce labo, les prélèvements effectués dans toute l’Afrique de l’Est n’auront plus à voyager à l’étranger pour être analysés.
L’analyse sanguine pour le passeport biologique, un outil compliqué à utiliser
Une bonne nouvelle saluée par les acteurs de l’anti-dopage, comme Hajjo Seppelt, qui soulignait avoir dénoncé il y a six ans l’ampleur du dopage au Kenya dans ses sujets diffusés sur la chaîne allemande ARD. Toutefois le journaliste britannique Andy Brown pointait du doigt un point délicat : le laboratoire ne pourra analyser que les échantillons sanguins, alors que les prélèvements urinaires devront continuer à être transportés à l’étranger, a priori vers Doha, pour vérification.
Mais l’Athletics Integrity Unit mise beaucoup sur les passeports biologiques, rappelant que c’est en athlétisme que ce programme est le plus utilisé. Avec 3500 échantillons sanguins prélevés dans le monde durant l’année 2017, incluant 25% d’athlètes d’Afrique de l’Est. Et cette politique a permis de déboucher sur 100 suspensions d’athlètes internationaux. Un laboratoire plus efficace aurait-il permis de détecter plus tôt les dérives d’Asbel Kiprop, Kipyegon Bett, Ruth Jebet, Jemima Sumgong, Rita Jeptoo ??? Probablement, sans perdre de vue que l’expérience montre qu’une procédure pour passeport douteux comporte beaucoup d’embûches scientifiques et juridiques, souvent sources de lenteurs, voire même de blocage complet n’aboutissant pas sur la sanction. C’est ainsi que pour la France, au début 2016, l’information avait circulé qu’une quinzaine de sportifs apparaissaient anormaux, et l’on évoquait 6 spécialistes d’athlétisme dans ce cas. A ce jour, seulement deux athlètes ont fait l’objet d’une sanction, Riad Guerfi, et Anouar Assila.
> Texte : Odile Baudrier
> Photo : D.R.