Une nouvelle fois, Gabriele et Federico Rosa sont mis en cause pour des accusations de dopage envers les coureurs du Kenya. Le sujet a été diffusé sur ZDF, la télévision allemande, et plusieurs témoins affirment qu’ils fourniraient de l’EPO aux athlètes de leur groupe d’entraînement, et paieraient des pots de vin pour couvrir les faits de dopage. Le groupe des managers italiens a déjà connu à plusieurs reprises depuis deux ans d’autres mises en cause, qui se sont toutes achevées sans suites.
A quelques jours du Mondial de Londres, les révélations se succèdent sur les aspects les plus glauques de l’athlétisme, et sur les pratiques douteuses de nombreux acteurs de ce sport. Après les chiffres effarants du nombre de dopés présents en finale des JO de Londres, c’est au tour des Rosa, de se retrouver mis en cause pour des faits liés au dopage, avec encore des informations sur la corruption sévissant au Kenya dans l’anti-dopage.
Le sujet diffusé ce dimanche 30 juillet par ZDF s’attaque aux Rosa, les managers les plus puissants au Kenya, présents dans le pays depuis plus de 30 ans, et représentant les intérêts des plus grandes stars de l’athlétisme et du marathon. Mais leur nom se retrouve associé à des contrôles positifs de membres de leurs groupes d’entraînement, et le dernier, celui de Jemima Sumgong, la championne olympique sacrée à Rio, a particulièrement marqué les esprits.
Justement, ce contrôle n’aurait été rendu public que parce que les Rosa n’auraient pas accepté le pot de vin exigé par des personnes de l’Agence Anti-Dopage du Kenya. Le conditionnel ne peut que s’imposer, mais c’est en tout cas ce qu’affirme un témoin du sujet ZDF, qui soutient qu’un conflit financier sur le montant du pot de vin à payer pour couvrir le contrôle positif de la championne olympique aurait provoqué sa révélation publique.
Et selon cet ancien employé de l’Agence Anti-Dopage du Kenya, cette pratique serait courante, et acceptée par les Rosa, aux fins de protéger leurs athlètes.
Les témoins apparaissant dans le documentaire, à visage dissimulé ou découvert comme le marathonien Matthew Kipkorir Sigei, (qui a réalisé plusieurs fois 2h09’, avec un ultime marathon en 2013). Ils sont très accusateurs à l’encontre des Rosa, soutenant qu’ils seraient les pourvoyeurs en EPO de leurs coureurs, et qu’ils leur prendraient 20% de leurs gains pour couvrir les contrôles.
« Il n’y a pas de faits »
Quel crédit accorder à ces accusations très graves ? A ce stade, il n’est pas possible de répondre à cette question. La réponse de « Rosa Associati » au journaliste allemand est sans équivoque : « Il n’y a pas de faits tangibles ». Les témoignages obtenus par le journaliste allemand sont éloquents, même s’ils ne concernent que trois personnes, et sont effectués à visage caché pour deux d’entre eux. Mais il est sûr aussi que, comme pour le sujet réalisé il y a un an par Hajjo Seppelt au Kenya, la question se pose sur la fiabilité des témoins dans un pays où justement la corruption est la règle. Et la rumeur avait couru l’année dernière que certains témoins avaient orienté leurs propos en contre-partie de quelques billets.
Toutefois, les doutes contre les Rosa ne sont pas récents, et déjà en 2015, après le contrôle de Rita Jeptoo, la Fédération du Kenya avait suspendu « Rosa Associati » pendant plusieurs mois, pour effectuer une enquête sur leur société de management, mais l’affaire s’était conclue sans qu’aucune information ne soit divulguée.
Il y a tout juste un an, Federico Rosa avait été placé en détention à Nairobi pendant quelques jours, suite à des accusations proférées contre lui, par Rita Jeptoo, et un autre athlète. Le manager italien avait été libéré in-extremis sur caution pour les JO de Rio, et le tribunal avait conclu en octobre par un non lieu à son égard. Gabriele Rosa avait saisi l’occasion du marathon de New York pour nous soutenir « Nous sommes complètement propres ».
Plus récemment, Federico Rosa avait fait les gros titres de la presse du Kenya, après avoir affirmé qu’il concevait des doutes à l’encontre de plusieurs marathoniennes de son groupe d’entraînement, et qu’il les avait suspendues de son groupe. Mais il s’était presque immédiatement rétracté, contestant les propos que lui avait prêtés le journaliste kenyan.
A cinq jours de l’ouverture du Mondial, le sujet ZDF tombe au plus mal pour les Rosa, et c’est précisément l’effet voulu d’un focus au moment le plus fort de l’année de l’athlétisme….
- Texte : Odile Baudrier
- Photo : D.R.