La justice espagnole a donné un coup d’arrêt, probablement définitif, à l’affaire Puerto, en interdisant l’identification des noms des poches de sang saisies chez le Docteur Fuentes. Un nouveau rebondissement dans une affaire traînant en longueur depuis 2006, et qui concerne des dizaines de cyclistes, mais également des footballeurs, des tennismen, et des athlètes, comme Marta Dominguez, ou Roberto Heras.
Cette fois, ce pourrait être le coup final dans cette partie de poker entamée depuis plus de 10 ans entre les autorités anti-dopage mondiales et la justice espagnole. Et les anciens clients du Docteur Fuentes peuvent pousser un sérieux ouf de soulagement…
La décision du Tribunal de Madrid les protège en interdisant l’identification des 211 poches de sang qui avaient été retrouvées chez le Docteur Fuentes en 2006 lors d’une perquisition de la police espagnole. Ces poches avaient été récupérées par l’Agence Mondiale Anti Dopage il y a juste un an, après que le Docteur Fuentes ait été blanchi des accusations liées à ses actes de dopage. Le Laboratoire de Lausanne qui les stockait demeurait dans l’attente d’un feu vert pour découvrir les noms de ces 211 sportifs, la dernière chance pour les autorités de l’anti-dopage pour obtenir des sanctions dans cette affaire où la Justice espagnole a tour à tour ordonné son classement sans suite, puis les acquittements des divers acteurs, et en particulier celui du Docteur Fuentes.
Parmi ses clients, de nombreux cyclistes, comme l’avait dévoilé en juin 2006 une liste dressée par l’UCI, comportant une trentaine de noms de cyclistes, et les révélations successives faisaient aussi état de footballeurs, de joueurs de foot et également d’athlètes.
Le cycliste Jesus Manzano, à l’origine de cette affaire, par ses révélations successives sur l’usage du dopage par transfusion sanguine, a ainsi fait état de plusieurs noms, comme celui d’Abel Anton, double champion du monde de marathon en 1997 et 1999, Reyes Estevez, champion d’Europe du 1500 m, qui n’ont pu être confirmés de manière plus officielle par la suite.
Marta Dominguez, acquittée, puis suspendue
Marta Dominguez, elle, est apparue dans cette affaire à la faveur de l’enquête menée dans le cadre d’une autre affaire, l’opération Galgo, menée en décembre 2010. Mais là encore, la justice espagnole l’avait blanchie, et à deux reprises, pour des accusations de trafic de produits dopants. Toutefois, l’Espagnole, sacrée championne du monde du steeple en 2009, avait été rattrapée par l’anti dopage, sur des irrégularités à son passeport biologique, qui l’avaient trahie, et avait amené au retrait de son titre mondial et à une suspension de trois ans.
Marta Dominguez s’était rendue jusqu’au Tribunal Arbitral du Sport pour contester cette sanction de l’IAAF, mais elle avait perdu devant l’instance de Lausanne. Celle qui avait été plusieurs années vice-présidente de la Fédération Espagnole d’Athlétisme, en lice aussi pour des fonctions politiques, a même été jusqu’à la Cour Suprême d’Espagne, pour soutenir que les tests anti-dopage effectués par l’IAAF violaient sa vie privée, mais elle a été déboutée début juin de cette plainte…
Roberto Heras, suspendu, puis acquitté
Dans l’affaire Puerto, un autre nom connu dans le monde de la course à pied avait été dévoilé. Celui de Roberto Heras, alors cycliste professionnel, et qui s’est réorienté depuis 2014 vers le trail running, sur les traces de son frère Miguel, doté d’un joli palmarès en trail.
Roberto Heras, qu’on sait client du Docteur Fuentes pour avoir été cité par le médecin durant son procès en 2013, avait été en fait suspendu pour deux ans suite à un contrôle positif à l’EPO survenu au Tour d’Espagne 2005, qu’il venait de remporter pour la 4ème fois. Mais en 2011, la Justice espagnole avait statué en sa faveur, au motif d’irrégularités dans les prélèvements d’échantillons, et annulé sa suspension, évidemment déjà effectuée…
Roberto Heras attaquait alors pour obtenir des dommages et intérêts, cette suspension ayant stoppé sa carrière cycliste, et très récemment, début mai 2017, la haute cour de justice de Barcelone a condamné l’Etat Espagnol à lui verser 725.000 euros de dommages, correspondant à la moitié de son salaire lors de sa dernière année d’activité, au sein de l’équipe Liberty Seguro, qu’il avait rejoint en leader après avoir longtemps évolué aux côtés de Lance Amstrong dans l’US Postal.
- Texte : Odile Baudrier
- Photo : D.R.