L’Agence Mondiale Anti Dopage a renoncé à poursuivre 95 athlètes russes qui avaient été cités dans le rapport Mc Laren publié en novembre 2015, pour leur utilisation de produits dopants. Un seul athlète a été sanctionné, et pour les autres, l’AMA estime les preuves insuffisantes pour décider de sanctions individuelles, en dépit des informations sur le système étatique mis en place en Russie, et qui a concerné près de 800 sportifs.
La montagne a accouché d’une souris. Il y aura un seul athlète à être suspendu pour de faits de dopage sur 96 noms qu’avait dévoilé le rapport de Richard McLaren en novembre 2015, qui avait établi que 714 sportifs avaient été concernés par la pratique du dopage à outrance mis en place par les institutions sportives en Russie. L’Agence Anti Mondiale a estimé que les éléments en sa possession ne permettaient pas de poursuivre ces athlètes.
C’est un rapport interne rédigé par Olivier Niggli, le Directeur Général de l’AMA, et obtenu par le New York Times, qui aboutit à cette conclusion très favorable aux athlètes. Et une telle décision ne manque pas de susciter de nombreuses questions sur la volonté réelle de certains acteurs de la lutte anti-dopage d’établir la vérité dans ce domaine.
Pourquoi une telle décision ? L’AMA a estimé que les preuves manquaient pour condamner chaque athlète à titre individuel. Le système mis en place par la Russie aurait permis que de telles preuves n’existent plus ou soient très limitées, tant d’années après les faits. C’est la théorie officiellement soutenue par l’AMA.
8000 échantillons ont disparu à Moscou
Malgré tout, plusieurs éléments sèment le doute sur la volonté réelle de l’AMA d’aboutir à des sanctions. Et surtout le fait que les échantillons d’urine stockés au laboratoire anti-dopage de Moscou se soient littéralement envolés, en partie par sa faute. En décembre 2014, l’AMA avait en effet pris le soin d’avertir le laboratoire moscovite de sa prochaine inspection. Les Russes avaient alors fait disparaître 8000 échantillons, sur les 10.000 conservés, qui auraient pu permettre d’établir l’utilisation de dopants.
Cette information était arrivée à point nommé pour le Docteur Rodchenkov, alors patron du laboratoire anti-dopage de Moscou, mais en réalité maître d’œuvre du dopage institutionnel en Russie. On sait que le Docteur Rodchenkov, maintenant réfugié aux Etats-Unis, a beaucoup de choses à dire sur le système qu’il a largement bâti, comme on peut le découvrir dans le passionnant film « Icarus ».
Mais l’AMA a soutenu dans son rapport interne que cet homme étrange avait été indisponible pour ses enquêteurs, ce que l’avocat du Russe a démenti formellement, soutenant qu’il n’avait nullement été contacté et qu’au contraire, il avait la volonté de parler…
Une nouvelle fois, un énorme imbroglio apparaît. Avec d’un côté des athlètes russes qu’on ne peut pas sanctionner. Et de l’autre, des athlètes russes interdits de compétition, en raison de l’interdiction faite à leur pays de disputer les grands rendez-vous mondiaux. A quelques mois des JO d’hiver, la situation est plus que jamais explosive.
- Texte : Odile Baudrier
- Photo : D.R.