Etudiant en STAPS à Reims, Clément Dhainaut, espoir première année a crevé l’écran lors du meeting de Reims en réalisant 1’48’’92 en salle sur 800 mètres. Un chrono qui lui ouvre des perspectives, l’été venu, pour les Europe Espoirs. Portrait.
Dans la bande à Farouk, Clément Dhainaut, ce n’est pas celui qui allume la mèche des blagues, ce n’est pas celui qui ouvre la boîte à vannes. Clément Dhainaut, c’est juste un gars sérieux, pas envieux, pas présomptueux, ambitieux, oui peut-être un peu.
Dans le groupe, Clément Dhainaut, c’est un peu l’eau qui dort. Au beau milieu des Vincent Luis, François Barrer, Benjamin André, des frères Brunguard, de Tarik Moukrime, il a posé ses filets. Il n’a pas encore les épaules bien carrossées d’un spe8 médiatisé mais ça prend forme. C’est encore flou, c’est encore mou, une prise d’air, un courant d’air. Sur la piste, Clément Dhainaut vient juste de sortir des coulisses.
C’était mardi soir, lors du meeting de Reims organisé par Raynald Goujard et son club le DAC, un 800 bien ficelé, bien empaqueté, Léo Morgana, Paul Renaudie, Kevin Gobillard au quart de tour, un junior dans la course le Toulousain Benjamin Robert et un espoir première année, Clément justement. Celui-ci avait prévenu la bande à Farouk « je suis dans ma salle, je ne vais qu’en même pas me faire taper chez moi ». Pour autant, il ne faut pas courir à cloche pied. Feu, c’était lancé, 600 mètres dans l’aspiration et puis ce déclic, mental et physique, une aisance, un courant électrique « je me suis senti relâché, j’étais là avec l’envie de gagner », Clément de s’imposer en 1’48’’92’’ à quinze centièmes de son record estival réalisé à Montbéliard l’an passé. Farouk d’exulter, à froid, quarante huit heures après ce petit exploit analysé ainsi « il est arrivé à Reims, c’était un beau cadet. Je me souviens de la finale du championnat de France cadets à Dijon en 2013, ils sont six sous les 1’55’ en finale dont Clément troisième en 1’53’’69. C’était costaud. J’ai pensé « pourvu que cela ne soit pas éphémère ». Car c’est parfois compliqué quand ça court vite chez les cadets. Mais là maintenant, après cette course, je ne sais pas où il peut s’arrêter. Mardi, il a été dans la manière ».
« C’est le groupe parfait pour le long et même pour les séances de SPE8 avec la présence maintenant de Tarik Moukrime »
Farouk Madaci n’est pas l’entraîneur de Clément Dhainaut. Le coach de Vincent Luis est juste observateur. Il décrit ainsi ce jeune espoir du 800 qu’il côtoie au quotidien « son point fort, c’est sa discrétion. Il ne se plaint jamais, toujours à l’heure. Il suit à la lettre le programme d’entraînement même s’il est fatigué ».
Clément est arrivé à Reims il y a trois ans, au pôle espoir, comme étudiant en STAPS option management. Il choisit Reims pour sa proximité avec Troyes sa ville natale, son club, son entraîneur Samuel Gfeller. Alexandre Brunguard lui conseille également de sauter le pas, lui aussi a migré de Troyes à Reims pour cette assurance de trouver un groupe demi fond homogène. Le Troyen le confirme « c’est le groupe parfait pour le long et même pour les séances de SPE8 avec la présence maintenant de Tarik Moukrime ».
Cet hiver, rien n’a été changé côté entraînement, pas de bouleversement, juste une continuité dans la progression arithmétique, sept à huit séances semaine et du long, de la prépa cross avec du seuil long pour forger et boulonner le foncier. Un schéma d’autrefois piétiné, abandonné par des entraîneurs de demi-fond court aujourd’hui dans une logique de sprint long. Mais les résultats sont là, Clément les commente « depuis deux ans, je mise sur le cross. L’an passé, je termine 16ème des championnats de France, j’ai pris goût au cross ». Cet hiver, il remporte deux cross longs, Troyes et Sainte Savine et mardi sur 800 mètres, il tire une ligne droite parfaite « sans me crisper, j’avais les jambes pour finir devant ». Equation réussie comme autrefois pour les Marajo, les Dupont.
« Il faudra que j’aille chercher les grosses courses »
1’48’’20 minima affichés pour les Europe en salle qui auront lieu à Belgrade en Serbie début mars, curieusement Clément Dhainaut passe cela sous silence. Ca glisse, la saison est déjà bornée autour des Inters de cross, des France en salle et des France de cross. La saison est courte…Ce sont finalement les 1’46’’60 minima des Europe Espoirs qui le chatouillent déjà « je me suis basé là-dessus, c’est costaud mais là, la porte s’ouvre. Il faudra que j’aille chercher les grosses courses ». Comme l’an passé, Montbéliard en 1’48’’77 puis 1’48’’81 à Amiens pour s’échouer finalement sur la grève des 1’48’’50 visa pour le Mondial juniors. Un échec qui a servi de leçon pour cet étudiant méthodique, fan de foot, cuistot à ses heures et qui rêve d’un gros championnat. Il se reprend pour dire en évitant l’écueil des propos présomptueux « mais pour l’instant je n’ai pas de grosses sélections, je ne m’enflamme pas, c’est juste une hypothèse». Il hésite avec le futur pour affirmer « il faudra ne pas avoir de complexe. Y aller avec envie, sans se poser de question ».
Clément Dhainaut s’est ainsi construit un équilibre, un triptyque reposant sur la confiance d’un entraîneur, la confiance de ses parents, le père est directeur régional chez Beauty Success, la maman est puéricultrice en crèche, la confiance de son groupe d’entraînement, un petit cocon précieux, une carapace que le jeune homme rêve de briser. Pour enfiler le costard du 800, c’est juste une question d’épaules !
> Texte et photo Gilles Bertrand