La suspension de quatre ans pour dopage d’Asbel Kiprop s’achève le 2 février 2022. Le Kenyan veut revenir à la compétition, et évoque même une participation au Mondial d’Eugene de cet été. Le Champion Olympique, triple champion du monde du 1500 mètres a toujours plaidé son innocence après son contrôle positif à l’EPO, en dépit des preuves accablantes.
« #iWillBeBack ». « I’ll be back ». «#illbeback »
Les formulations changent selon les comptes Facebook utilisés par Asbel Kiprop, mais le message demeure le même : « Je serai de retour ». Et au fil des mois, il égrène le décompte des jours qui le séparent de la date de sa fin de suspension.
2.02.22. Hasard de la procédure, c’est ce jour-là, décliné autour du chiffre 2, qu’Asbel Kiprop est autorisé à reprendre la compétition après sa suspension prononcée en avril 2019.
Plus de quatre ans ont passé depuis ce jour de novembre 2017 où l’échantillon prélevé à son domicile a révélé la présence d’EPO. Mais Asbel Kiprop n’a pas changé d’un iota sa version des faits : il est innocent.
Le 27 novembre 2021, il marque d’une manière étonnante la date anniversaire de ce contrôle : il court 27 km ! Avec 17 km le matin, et 10 km le soir. Et dans le post Facebook qu’il rédige ce jour-là, il assène une fois de plus ses vérités : il n’a commis aucune faute, ce contrôle a été une erreur, à l’origine inconnue.
Le 23 décembre 2021, il annonce qu’il lui reste 40 jours jusqu’à son retour, et il explique : « Je ne reviens pas pour performer par miracle, mais pour profiter de ma liberté après la suspension de 4 ans pour un faux dopage. En espérant que cela n’arrive plus à aucun humain innocent ».
Victime, et encore victime. Le credo demeure, et en septembre 2021, il affirme même être le premier champion olympique et champion du monde à avoir été accusé à tort de dopage.
De l’EPO naturelle, un échantillon falsifié, les explications décousues n’ont pas convaincu
Les faits sont pourtant accablants. L’EPO a été détectée à deux reprises dans l’échantillon A, puis dans l’échantillon B. Mais Asbel Kiprop avait cru pouvoir profiter d’une clémence après la découverte que le préleveur l’avait informé la veille de son contrôle, (et de deux autres contrôles effectués durant cette période) et lui avait demandé de l’argent en contrepartie. Et selon sa version, le préleveur aurait manipulé l’échantillon pour y introduire de l’EPO, car mécontent d’avoir reçu un pot de fin trop faible.
Durant la longue procédure, l’avocat d’Asbel Kiprop n’avait pas hésité à accumuler les explications pour justifier la présence d’EPO, soutenant qu’il s’agissait d’EPO naturelle produite après un entraînement à 2700 mètres d’altitude, que les médicaments absorbés par l’athlète suite à une grippe avaient produit de l’EPO, ou encore qu’il avait été victime d’une substitution de son échantillon.
Trop, c’est trop, lui avaient répondu les juges de « Sports Resolution », chargés par l’IAAF de statuer sur le dossier. Et de prononcer une suspension de 4 ans.
Asbel Kiprop se faisait fort alors d’obtenir l’annulation de cette sanction auprès du Tribunal Arbitral du Sport. Mais son avocat canadien ne transmettait finalement aucun document à l’instance suisse à l’appui de cet appel, et cette action s’achevait sans décision.
Quelles seront les ambitions d’Asbel Kiprop pour ce come back ?
Les versions changent selon les jours. Tantôt, il évoque une reprise pour profiter de sa liberté. Tantôt, il parle d’un retour en Diamond League et de l’ambition d’une participation au Championnat du Monde d’Eugene de cet été.
Les bribes d’entraînement qu’il dévoile sur les réseaux sociaux ne permettent pas de se faire une idée précise du niveau qu’il affiche maintenant. Début décembre, il enchaîne 5 fois 2000 mètres, courus entre 5’51’’ et 6’01’’. C’est une allure de 20.51 km. Très très loin de son chrono sur 1500 mètres, 3’33’’17, dans sa dernière saison, en 2017, et à des années lumière de son record personnel, ses 3’26’’69, courus à Monaco à l’été 2015, qui l’avaient alors propulsé en 3ème performer mondial de tous les temps.
A maintenant 32 ans, après quatre ans d’arrêt, et une période où sa vie est devenue très dissolue, l’obstacle physique paraît quasi-insurmontable. Les contraintes juridiques pourraient aussi le tenir éloigné des pistes, du moins pour une sélection officielle, puisque la Fédération d’athlétisme du Kenya a posé le principe de refuser l’intégration en équipe nationale d’un athlète convaincu de dopage.
Toutefois dans le cas où Asbel Kiprop retrouve un vrai niveau, la règle sera-t-elle strictement appliquée à l’encontre de l’un des athlètes les plus titrés du Kenya, champion olympique et triple champion du monde ???
- Texte : Odile Baudrier
- Photos : Gilles Bertrand