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Anti-dopage : l’athlétisme, le sport le plus contrôlé en France

Une nouvelle fois, le rapport annuel d’activité de l’AFLD révèle que l’athlétisme demeure le sport le plus contrôlé en France, devant le cyclisme. Rémi Keller, le président de la commission des sanctions, n’a pas hésité à y déclarer que beaucoup de fédérations traitent le problème du dopage avec légèreté, et il pointe en particulier du doigt la FFA.

Une fois de plus, l’athlétisme conserve sa place de leader des contrôles effectués par l’AFLD. Et cela même si les nouvelles orientations adoptées par l’AFLD, à savoir une surveillance centrée sur les sportifs de haut niveau, à l’exclusion désormais des sportifs «basiques», ont provoqué une diminution du nombre de prélèvements effectués en 2019. Avec 1274 contre 1705 prélèvements enregistrés en 2018.

Cette baisse est d’ailleurs particulièrement forte en athlétisme, comme pour le rugby à XV, qui passe de 1113 à 960 alors que le cyclisme poursuit sur la tendance antérieure (1118 en 2019 contre 1106 en 2018), et que le foot enregistre, au contraire, une forte hausse, de 559 en 2018 à 870 en 2019. Sur le plan du nombre d’échantillons, le cyclisme caracole en tête, avec 2491 analyses, contre 1503 pour l’athlétisme (1441 urinaires et 62 sanguins).

Côté cas positifs, l’athlétisme apparaît en 2ème position derrière le rugby, et devant le cyclisme, avec 14 résultats d’analyse anormaux, soit un pourcentage de 0.9% du nombre d’échantillons.

Un problème pris à la légère par les fédérations

En 2019, il s’agissait de la première année pleine où le pouvoir de sanction revenait à la commission des sanctions créée en octobre 2018, en vue de séparer les compétences de contrôles et de sanctions. Et le président de cette commission, Rémi Keller, conseiller d’Etat, n’a pas hésité à donner un point de vue très offensif en estimant que : « beaucoup de fédérations semblent traiter le problème du dopage avec une certaine légèreté. Nous l’avons vu ces derniers temps en athlétisme, par exemple, mais ce n’est malheureusement pas la seule discipline concernée. »

Une analyse sévère appuyant sur le manque d’informations sur le dopage communiquées aux licenciés d’une fédération, et qui, selon son observation à travers les différentes commissions des sanctions, se retrouvent ainsi livrés à eux-mêmes et réceptifs aux mauvais conseils de leur entourage.

14 contrôles positifs en 2019 ???

Selon le rapport, durant l’année 2019, la commission a tenu 17 séances, soit 112 dossiers, et 111 décisions. Mais la transparence n’est pas de mise pour la majorité des décisions, qui sont très rarement publiées officiellement sur le site de l’AFLD. C’est ainsi que le nombre de 14 contrôles positifs pour l’athlétisme apparaît très élevé par rapport au nombre de cas rendus publics. A ce jour, certains contrôles de 2019 demeurent visiblement encore secrets…

Autre point intéressant à observer, l’athlétisme est le sport qui a fait l’objet du plus grand nombre de renseignements collectés par l’ALFD. Ceci à travers le biais d’un formulaire figurant sur le site de l’Agence, dans la rubrique « signaler un fait de dopage ». Ce sont en effet 23 signalements qui ont été effectués de la sorte, contre 18 pour le cyclisme et 8 pour le Rugby.

Damien Ressiot et Rémi Wallard, des connaisseurs de l’athlétisme

Cet élément témoigne de l’inquiétude d’observateurs de l’athlétisme, qui utilisent ainsi cette plate-forme pour attirer l’attention sur des éléments troublants qu’ils ont pu constater. Une méthode très efficace sachant que tout signalement est pris en compte par le département des enquêtes et du renseignement de l’AFLD que dirige Damien Ressiot.

L’ancien journaliste de l’Equipe s’est certes mis en évidence à l’époque pour son investigation sur Lance Amstrong, mais durant ces 25 ans passés au quotidien sportif, il avait également beaucoup décortiqué les affaires de dopage dans l’athlétisme. Un atout pour mieux pénétrer ce sport, d’autant qu’il bénéficie également de la compétence de Rémi Wallard, ancien athlète de haut niveau, champion d’Europe du 4*400 m en 2005, et officier de police judiciaire mis à disposition du département des contrôles depuis 2016.

Plus de subventions pour l’AFLD

Côté budget, il ressort avec une augmentation des recettes, atteignant 11.191 millions d’euros, à la faveur d’une subvention de fonctionnement de l’Etat, en nette progression, 9.770 millions d’euros, contre 9.590 en 2018. S’y ajoutent les prestations de services facturées pour l’analyse d’échantillons pour le compte d’autres clients du laboratoire de Chatenay Malabry (fédérations internationales, autres agences anti-dopage…). Soit environ 4385 échantillons (2/3 des 13829 échantillons reçus en 2019), pour une facture de 1.395 millions d’euros, correspondant à un prix de vente de 318 euros.

Mais quel est le coût réel d’un contrôle ? L’analyse n’est pas si facile. Si l’on considère un total de dépenses de fonctionnement de 10.294 millions, d’où l’on soustrait les frais inhérents aux prestations de services, le coût unitaire ressortirait à 1214 euros. Mais ce chiffre peut évidemment être estimé comme farfelu, compte tenu que le budget global intègre tous les coûts de la localisation, et des actions éducatives ou d’information menées par l’AFLD.

Le Britannique Andy Brown, journaliste anti-dopage de référence dans le monde anglo-saxon, avec le site « SportsIntegriyInitiative.com », avait décortiqué fin mai les rapports annuels délivrés par trois agences anti-dopage, celles de l’Irlande, du Danemark et des Pays-Bas. Et il avait conclu que dans ces pays, un contrôle anti-dopage coûte environ 750 dollars.

  • Texte : Odile Baudrier
  • Photo : D.R.