Alexandre Saddedine termine 7ème du 5000 mètres du Championnat d’Europe espoirs. Une petite déception tout de même pour le jeune athlète qui avait amélioré cette saison tous ses records.
Alors, déçu ou pas déçu ? Les réponses s’embrouillent. Les mots ne semblent pas traduire ce que reflètent les visages. Alexandre Saddedine sort juste de son 5000 mètres. Que pense-t-il de sa 7ème place ? Le très réservé athlète explique : « je n’ai pas su tirer mon épingle du jeu. Mais je ne suis pas déçu. » Son regard triste et fatigué paraît dire tout le contraire…
Les yeux qu’il jette vers Zouhair Foughali, son entraîneur, réflètent une certaine déception. Zouhair Foughali, lui, veut adopter une analyse positive de cette finale : « C’est une bonne course. Il arrive avec le 8ème temps, il finit 7ème, c’est bien. »
Pourtant cette attitude optimiste s’effrite rapidement, et Zouhair Foughali confie : « Oui, je suis déçu. Je pensais qu’il ferait mieux. J’espérais un podium. » Le coach veut tout de même relativiser : «Il pouvait finir entre 3ème et 7ème. »
Alexandre Saddedine a enfilé les records
Alexandre arrivait à Tallinn gonflé à bloc par une saison estivale exceptionnelle. Les records s’y étaient succédé pour une démonstration de force convaincante. Mi-juin, 13’49’’21 sur le 5000 m, soit 28 secondes de mieux que son précédent record de 2013. Fin juin, il confirme sa progression, cette fois sur 1500 m, avec 3’42’’52 sur 1500 m, il gagne 6 secondes en un an. Et début juillet, c’est sur le 1000 mètres qu’il brille, 2’20’’18. Cela lui donne la petite touche de confiance en plus sur sa capacité à gérer avec brio à Tallinn une fin de course rapide.
Mais sur une piste, les scénarios se font et se défont sans qu’aucun réalisateur n’intervienne pour replacer les acteurs dans le bon champ… Dès le coup de pistolet, le Turc Ali Kaya entame une croisade un tantinet nationaliste. Sait-il qu’il évolue avec de jeunes athlètes et non pas face aux meilleurs mondiaux ??? Sa tactique n’en montre rien, il se joue de toute politesse face à ses rivaux.
Derrière lui, ça s’organise comme ça peut. Alexandre Saddedine lui-même prend la tête un moment, et il se justifiera : « J’ai voulu calmer le train. Pour revenir au rythme d’un championnat et pas d’un meeting… » Mais ses adversaires n’ont cure, et le jeune Français va subir avec peine leur loi : « Il y avait beaucoup d’à coups. Ca se joue à l’emballage. Au milieu de la course, j’ai ressenti que je n’étais pas fluide. Je n’avais pas les jambes pour le podium. »
Zouhair Foughali le prépare à Maisons Alfort
La faute à une récupération difficile après son enchaînement de chronos dans les toutes dernières semaines avant ce rendez-vous ??? La question irrite visiblement Zouhair Foughali qui rétorque : « Tout était programmé. »
Zouhair Foughali, connu pour avoir été l’entraîneur de Mahiedine Mekhissi qu’il avait amené à la médaille d’argent olympique à Pékin sur le steeple avant qu’ils se séparent avec fracas, opère comme entraîneur au club de Maisons Alfort où Alexandre Saddedine a signé après avoir quitté l’ESFRA Reims.
Comme en son temps avec Mahiedine Mekhssi, le duo fonctionne principalement à distance. Le jeune homme effectue des allers-retours entre Reims et Maisons Alfort, où il dispose depuis peu d’un studio.
Et Zouhair Foughali ne dissimule pas qu’il espère que cette nouvelle proximité impacte efficacement sur la préparation dans l’optique des JO. Le coach dévoile ses espoirs futurs pour son protégé : « Je l’estime à 13’35’’ ».
Un temps qui lui aurait à coup sûr permis d’être sur le podium de cet Europe. Ali Kaya y était évidemment intouchable avec sa référence de 13’00’’ tout récemment couru au meeting de Rome. Quant au Belge Isaac Kimeli, futur second, il affichait, lui, un record à 13’34’’, et l’Espagnol Carlos Mayo, en bronze, pointe en 13’36’’.
La comparaison des performances se révèle impitoyable sur toutes les distances ou presque. Sur 800 mètres, si Ali Kaya et Carlos Mayo n’ont pas de marque, Isaac Kimeli vaut 1’48’’88, contre 1’50’’78 à Alexandre Saddedine. Sur 1500 mètres, pas plus de référence pour Ali Kaya, mais un 3’40’’28 pour Kimeli, un 3’41’’44 pour Mayo et 3’42’’52 pour le Français.
Même si quelques chronos ne peuvent suffire à prédire le résultat d’une finale de championnat, et que les surprises fourmillent souvent, ces chiffres valident que le podium était bel et bien hors de portée d’Alexandre Saddedine…
- Texte : Odile Baudrier
- Photo : Gilles Bertrand