Meilleure performeuse mondiale de la saison indoor avec 1’59″21, l’anglaise Jennifer Meadows se présente radieuse pour aborder les Europe. Car devant elle, le ménage a été en partie réalisé notamment en Russie avec la chute de Mariya Savinova pour dopage.
Jenny Meadows n’y peut rien. Elle a beau se planquer derrière ses larges lunettes blanches, elle fait son âge à côté des jeunettes du 800. A 33 ans, elle rend 10 ans à ses soeurettes du double tour. Mais qu’importe, l’envie est encore là, elle est pro et son corps supporte encore les séances.
L’anglaise est même pointée la plus rapide au bilan mondial hivernal à l’approche des Europe en salle qui auront lieu à Prague du 6 au 8 mars, avec deux performances sous les 2 minutes, 1’59 »21 et 1’59 »85.
Celle qui vient à nouveau de remporter le titre national en salle, une simple formalité, a retrouvé le désir de se battre. Car lors de ces derniers mois, l’horizon s’est éclairci pour les spécialistes du 800 avec la mise au placard d’athlètes russes convaincues de dopage dont Mariya Savinova, l’ange noir enfin guillotinée après avoir volé son lot de titres et de médailles.
Meadows et Savinova, c’est comme une longue histoire de haine qui débuta dès Turin en 2009 lors des Europe en salle. La Russe remporte le titre, l’anglaise échoue à la quatrième place. La déception est réelle mais son questionnement sur le dopage n’est pas encore pleinement formalisé. Quelques mois plus tard, dans l’emblématique stade de Berlin, elle tombe à nouveau sur un os que les reporters rongent eux aussi jusqu’à la moelle. Caster Semenya subtilise le titre, on sort toutes les encyclopédies de médecine pour mieux comprendre cette énigme génétique, Jenny Meadows, médaillée de bronze, monte sur le podium mais ne récolte pas le bien qui devait être le sien.
Les interrogations naissent, les premières frustrations aussi. A Doha, à Barcelone, à Daegu, Mariya Savinova est toujours là. La russe gère les finales selon un scénario implacable. Elle est imbattable. Meadows se débat, trouve parfois la faille avec son petit gabarit énergique. Mais passé les honneurs, elle fulmine et râle. Elle n’est pas là où elle devrait être. Son palmarès est écorné.
Elle le dit haut et fort. On l’écoute et certains comprennent ce message d’impuissance. Mais on la traite aussi de mauvaise joueuse, de mauvaise perdante. A Paris, dans l’enceinte de Bercy, c’est la russe Yevgeniya Zinurova qui l’emporte après avoir sucé la roue. Elle tombe pour dopage. Le titre est alors réattribué à l’anglaise mais il manque le God Save The Queen pour faire monter les larmes et authentifier cette victoire qui lui est volée sur le terrain.
La chute de Savinova a donc validé tous les propos, toutes les suppositions, toutes les accusations que Jenny Meadows avaient clamés, excédée, aux micros de la presse. Et c’est cela qui la rend aujourd’hui si enthousiaste à disputer une nouvelle saison en salle. Avec ce regain de confiance pour aborder ces Europe car aujourd’hui, elle peut dire droit dans les yeux : « J’avais raison ».
> Texte et photo : Gilles Bertrand