La marathonienne Rebecca Cheptegei, brûlée vive par son ex-compagnon, est la quatrième coureuse tuée en trois ans au Kenya suite à des violences conjugales. Une tragédie qui a levé sur l’affairisme des hommes kenyans, autour des athlètes femmes douées du pays. Mais il est également facile de voir que le dopage fait certainement partie de ces relations sordides entre coureuses douées et hommes cupides. Pour preuve, ce sont actuellement 44 Kenyanes qui sont suspendues sur un total de 100… En France, à nouveau, une marathonienne kenyane se voit suspendue pour contrôle positif, après sa victoire au marathon Nice Cannes en 2022.
Son meurtre a fait le tour du monde. Par sa violence, elle a eu le corps brûlé à 80%. Par son contexte, elle a été immolée devant ses deux enfants. Par son cadre sportif, elle venait de terminer le marathon olympique à Paris.
En ce début septembre 2024, Rebecca Cheptegei est ainsi devenue la 4ème coureuse en trois ans tuée au Kenya par leur conjoint ou ex-conjoint. Agnès Kirop avait été la première, à l’automne 2021, deux mois après avoir battu le record du monde du 10 km, également massacrée par son compagnon qui refusait sa demande de divorce. Depuis Damaris Mutua et Edith Muthoni ont connu la même tragédie. Et d’autres ont vécu les violences conjugales, d’une grande banalité au Kenya, comme dans tant d’autres pays.
Mais le contexte de réussite sportive et la perspective de gains financiers conséquents amplifient ces relations de violences lorsque les liens sentimentaux se distendent. A la suite de la tragédie Cheptegei, une athlète du Kenya a levé le voile sans tabou sur la réalité de la vie sentimentale des coureuses talentueuses du pays.
Aliphine Tiliamuk, originaire du Kenya, et maintenant de nationalité américaine, a livré via X un point de vue sans équivoque : « Des hommes sous qualifiés recherchent des femmes avec des potentiels en course à pied dans les villes du Kenyan. Ils arrivent, offrent une aide financière gratuite, du coaching et pacing, ils se marient. Quand elles réussissent, ils la contrôlent, elle et tous ses dollars. Si elle veut partir, c’est alors qu’elles rencontrent la mort. Il y a beaucoup de victimes. »
Ces prédateurs douteux ne peuvent évidemment admettre qu’une femme prolixe, capable de remporter des milliers de dollars par des victoires sur marathon ou semi à travers le monde entier, veuille prendre son indépendance. Pour Rebecca Cheptegei, le litige serait venu d’un terrain revendiqué par son ex-compagnon.
Le dopage, massif chez les femmes du Kenya
Mais un autre domaine semble très impacté par l’état d’esprit de ces hommes peu scrupuleux. Celui du dopage. Ces derniers mois, il est souvent apparu dans la liste des athlètes du Kenya suspendus, des noms au féminin, marathoniennes, semi-marathoniennes, coureuses sur route, de tous les niveaux.
Un rapide comptage dans la base des athlètes actuellement suspendus par l’Athletics Integrity Unit confirme cette impression : sur un total de 100 personnes, on retrouve 44 femmes ! C’est énorme, à considérer que beaucoup plus d’hommes que de femmes du Kenya mènent carrière en course à pied. Egalement impressionnant, quand on observe que dans la base mondiale Anti Doping Database, le pourcentage d’athlètes féminines suspendues (tous sports confondus) est de 5.72% en 2022 et de 3.76% en 2023.
Une triste tendance qui ne peut que laisser à penser à une exploitation très organisée au Kenya, et que les femmes servent souvent de cobayes à leur compagnon-coach-sparring partenaire, visiblement peu hésitants à leur administrer les bons produits pour booster les performances. A leur insu, avec leur accord, ou avec un accord forcé, l’avenir nous le dira certainement quand les paroles se libèreront enfin.
Des hommes peu inquiets aussi des risques qu’ils font prendre à leurs protégées, car il est notable que la plupart des Kenyanes ont été suspendues après des contrôles positifs lors de compétitions sportives disputées dans le monde entier. Comme pour Sharon Jemutai Kosgei, positive au trimétazidine (modulateur hormonal) après avoir remporté le marathon Nice-Cannes en octobre 2022, et enfin récemment suspendue pour 4 ans par l’AFLD. Car il est aussi notable que dans tous les pays, les agences anti-dopage utilisent leurs ressources propres pour contrôler des athlètes du Kenya squattant les podiums.
Ces compagnons, coachs, managers, n’ont cure, car ils savent que beaucoup de monde passe à travers les mailles du filet, et ils espèrent pouvoir profiter des primes financières conséquentes distribuées. A défaut, il s’agira seulement d’un « investissement » raté.
Mais la santé des femmes ainsi dopées, pourra, elle, être durablement affectée. Là encore, ce n’est évidemment pas le problème de ces hommes peu scrupuleux…
Analyse : Odile Baudrier