Le bilan 2019 des violations des règles anti-dopage publié en cette fin d’année 2021 par l’Agence Mondiale Anti-Dopage révèle une situation contrastée qui ne peut que susciter des critiques, en particulier avec seulement 57% des contrôles positifs suivis par une sanction disciplinaire. L’athlétisme fait, à nouveau, figure de mauvais élève, alors que la France, comme les Etats-Unis, se distinguent par un net repli de leur activité anti-dopage.
Comme chaque année, c’est avec un décalage plus que conséquent que l’Agence Mondiale Anti-Dopage publie le bilan des violations des règles anti-dopage. Fin 2021, ce sont donc les chiffres de l’année 2019 qui apparaissent enfin au grand jour. Les éléments datent déjà, et ne dévoilent pas un revirement majeur de la lutte anti-dopage mondiale. Pour preuve, ce fameux 1%, qui correspond au pourcentage d’échantillons positifs constatés, en 2017, comme en 2019. Un tout petit nombre, peu en relation avec le constat de diverses études qui évoquent plutôt près de 30% (*) de sportifs utilisateurs de produits interdits.
Autre élément peu convaincant, celui du nombre de sanctions prononcées, qui, s’élève à seulement 57% des contrôles positifs. Certes ce pourcentage s’avère en petite augmentation, il était de 53% en 2017. Mais cela représente tout de même un grand nombre de cas de dopage qui passe à la trappe, soit à la faveur d’AUT, soit de différentes raisons, qui « interdisent » la sanction.
Et à ce petit jeu, les Etats-Unis s’avèrent particulièrement efficaces, et les chiffres témoignent de leur laxisme. Sur 11.213 échantillons collectés, 194 se sont révélés positifs, mais au bout du compte, seulement 35 suspensions ont été décidées, soit 18% ! Pourquoi ? Parce que 37 contrôles ont été justifiés par des AUT, mais surtout car l’USADA, l’agence américaine anti-dopage a estimé que dans 114 cas, il n’y avait pas matière à donner une suite sur ces échantillons positifs, et a ainsi classé ces cas.
Une attitude à l’opposé de celle de l’agence anti-dopage de l’Italie, qui n’hésite pas, elle, à mettre ses sportifs à l’index, et affiche un taux de 78% de sanctions prononcées… L’Italie compte ainsi parmi les leaders mondiaux en termes de sanctions, à quasi-égalité avec la Russie et l’Inde, et les chiffres 2019 témoignent d’une certaine régularité (154 cas en 2019 et 171 en 2017)
Elle se situe aux antipodes de la France, qui enregistre une chute spectaculaire de son nombre de cas positifs, passant de 128 cas en 2017 à 62 en 2019. Et les chiffres du rapport de l’AFLD sur l’année 2020, publiés en ce mois de juin 2021, ont confirmé cette tendance à la baisse des détections. Certes la crise sanitaire avait perturbé l’activité des contrôles en 2020, avec 18% de baisse, mais le nombre de Résultats anormaux avait diminué, lui de 57% en 2020 et de 79% depuis 2019.
L’athlétisme demeure à la deuxième place des sports les plus « dopés », avec 227 cas positifs, contre 272 au Body Building et 179 au cyclisme. La marque d’une pratique large du dopage chez les athlètes ? Peut-être, mais ces chiffres résultent bien sûr aussi de l’activisme important dans ce sport, avec 10.000 contrôles d’écart entre l’athlétisme et le cyclisme (34.576 contre 24.577). En toute logique, plus on cherche, plus on trouve !
L’athlétisme s’affiche également comme le sport qui constate le plus grand nombre de violations « non analytiques », non constatées par un contrôle positif, qu’il s’agisse de refus de contrôle, de défaut de localisation, de trafic, de possession, ou d’utilisation. Les 54 sanctions de ce type prononcées en l’athlétisme représentent 15% du total de 351 sanctions, et le cyclisme pointe loin derrière, avec 39 sanctions, soit 11%. Voilà le résultat de l’intervention de l’Athletics Integrity Unit, qui mène dans l’ombre un énorme travail d’enquête et de collecte de renseignements, pour repérer les dérapages.
Ø Texte : Odile Baudrier
2019 | 2017 | |
Echantillons | 278.047 | 245.232 |
AAF | 2701 – 0.98% | 2749 – 1.12% |
Sanctions | 1535 – 57% | 1459 – 53% |
Annulé pour raisons médicales – AUT | 297 – 11% | 275 – 10% |
Sans suite à donner (autre que raison médicale) | 274 – 10% | 123 – 4.5% |
Pas de sanction – athlète innocenté | 49 – 2% | 120 – 4.3% |
En attente de décision | 546 – 20% | 772 – 28% |
Athlètes sanctionnés | 1183 hommes -77% 83 sports 115 nationalités | 1135 hommes – 78% 89 sports 111 nationalités |
Echantillons positifs | 2035 collectés en compétition -75% 2679 échantillons urinaires – 99% 22 échantillons sanguins | 2222 collectés en compétition – 81% 2720 échantillons urinaires -99% 29 échantillons sanguins |
Violations règles anti-dopage non analytiques (refus de contrôle-défaut localisation-falsification contrôle…) | 377 351 athlètes 26 personnes support athlètes | 345 317 sportifs 28 personnes support athlètes |
ATHLETISME | EN 2019 227 cas positifs – N°2 Body building : 272 Cyclisme : 179 | EN 2017 242 cas positifs – N°2 Body building : 266 Cyclisme : 218 |
FRANCE | 62 contrôles positifs – N°6 mondial Russie : 167 Italie : 157 Inde : 152 Brésil : 78 Iran : 70 France : 62 Etats Unis : 62 | 128 contrôles positifs – N°2 mondial Italie : 171 France : 128 Etats Unis : 103 Brésil : 84 | |
Les sanctions par sport en France | Athlétisme : 2 Bodybuilding : 8 Boxe : 10 Cyclisme : 2 Escrime : 1 Kickboxing : 1 Powerlifting : 5 Rugby : 2 | ||
Les types de sanctions | 40 échantillons positifs (3 hors compétition) 22 violations non analytiques |
Les chiffres de l’athlétisme | |||
Chiffres 2019 | 34.576 échantillons | 253 Cas positifs 17 AUT 12 Sans suite 1 pas de sanction 50 en attente | 173 Sanctions |
Chiffres 2017 | 31.483 échantillons | 295 Cas positifs 14 AUT 11 Sans suite 35 pas de sanction 62 en attente | 171 Sanctions |
Les chiffres 2019 en détails | Echantillons | Cas positifs | Sanctions |
Athlétisme Sprint 400 m et moins 800-1500 m 3000 m et plus Semi marathon Ultra running Sauts Lancers | 49 8.119 3.574 13.099 32 4 3.962 4.421 | 1 51 30 108 1 1 27 34 | 0 34 25 78 0 1 20 15 |
Sanctions en athlétisme : classement par pays
Russie – 35 – 18 AAF – 17 non analytique
Kenya – 29 – 21 AAF – 8 non analytique
Inde – 20 – 19 AAF
Maroc – 12 – 12 AAF
Nigéria – 6 – 6 AAF
Etats Unis – 7 – 2 AAF – 5 non analytique
Italie – 7 – 5 AAF – 2 non analytique
Ukraine – 7 – 4 AAF – 3 non analytique
Espagne – 6 – 6 AAF
Afrique du Sud – 5 – 4 AAF – 1 non analytique
Chine – 5 – 4 AAF -1 non analytique
Brésil – 4 -3 AAF – 1 non analytique
Egypte – 5 – 5 AAF – 1 non analytique
Iran – 5 – 5 AAF
France – 4 – 2 AAF – 2 non analytique
Allemagne – 4 – 4 AAF
Grande Bretagne – 4 – 1 AAF – 3 non analytique
Grèce – 4 – 1 AAF – 3 non analytique
(*) Ce pourcentage de 30% résulte d’une étude réalisée en 2011 lors du Mondial d’athlétisme de Corée. Il avait fallu deux années pour que l’IAAF, inquiète de ces chiffres élevés, accepte sa diffusion.