La suspension d’Alberto Salazar confirmée
Alberto Salazar n’a pas eu gain de cause auprès du Tribunal Arbitral du Sport, et deux ans après l’annonce de sa sanction pour des faits de dopage, le coach américain voit cette suspension confirmée à quatre ans. Pourtant, aucun des athlètes qu’il a entraînés n’a reçu le moindre blâme. Alberto Sazalar a également été suspendu à vie de la fonction d’entraîneur par « SafeSport » pour des abus sexuels et émotionnels sur ses athlètes féminines.
Deux ans plus tard, les donnes n’ont pas changé pour Alberto Salazar. Le coach américain n’a pas gagné dans son appel devant le Tribunal Arbitral du Sport, où il espérait obtenir la levée de sa suspension de quatre ans décidée en septembre 2019 par l’AAA, sur demande de l’USADA.
Le Tribunal Arbitral du Sport n’a pas pris sa décision à la légère. Ce sont 9 jours d’audience qui se sont tenues, en visio-conférence, en mars 2021 pour disséquer tous les éléments contenus dans ce dossier très volumineux. Et les juges du TAS ont mis six mois pour rendre leur verdict.
A travers un communiqué relativement sibyllin, qui confirme les accusations formulées par l’USADA contre Alberto Salazar, et le Docteur Jeffrey Brown, médecin à sa solde. A savoir possession de testostérone, complicité avec le Docteur Brown pour l’administration de la méthode interdite, falsification du processus anti-dopage concernant l’injection de L-carnitine.
Mais ce texte d’une page et demi contient tout de même deux petites « bombes ». La première est que les juges du TAS estiment qu’aucun élément tangible ne leur a été présenté qui puisse valider l’idée que les athlètes entraînés par Alberto Salazar ont été dopés par ses soins et ceux du docteur Brown. La seconde est que le rapport complet sur cette affaire sera publié par le TAS après que certaines informations soient supprimées au nom de la protection au nom de la vie privée…
La transparence n’est pas de mise, ce n’est pas si rare, mais elle dérange tout de même s’agissant d’Alberto Salazar, l’entraîneur vedette des JO de Londres, avec ses deux égéries, Galen Rupp et Mo Farah. Puis de Safan Hissan au Mondial 2019.
Car les données brutes des performances de ce trio laissent apparaître des progressions brutales et rapides qui ne peuvent qu’interpeller les spécialistes, peu prompts à croire à cette capacité soudaine de grignoter les secondes qu’ont connu Mo Farah et Safan Hissan dès qu’ils se sont retrouvés sous le giron de l’Américain à Portland.
Et ce concept d’un entraîneur détenant de la testostérone, qu’il aurait seulement utilisée pour tester sur ses propres enfants, mais sans que ses protégés y aient recours, ne peut que susciter l’incrédulité.
Mais reconnaître la responsabilité d’Alberto Salazar dans leur dopage alors que ces athlètes n’ont jamais connu le moindre contrôle positif serait une bombe à retardement pour Nike, qui a soutenu jusqu’au bout son coach vedette. Même après la dissolution du NOP, le club d’athlètes professionnel entraînés par Alberto Salazar, la marque lui a maintenu son aide, en particulier en finançant des frais de justice qu’on imagine énormes au vu des éléments présentés.
Ainsi il a fallu une vraie pression publique pour que Nike retire son nom sur le Campus Nike de Beaverton à Portland. Pourtant au-delà de l’aspect sportif, l’image d’Alberto Salazar apparaît durablement souillée dans un autre domaine, celui du harcèlement sur de jeunes athlètes.
« SAFESPORT », un organisme créé aux Etats-Unis par le Sénat pour garantir un sport moins dévoyé de dérives douteuses, a frappé un grand coup en juillet dernier, en annonçant que le coach était désormais suspendu à vie d’entraîner, en raison des abus sexuels et émotionnels commis sur ses athlètes féminines.
Mary Cain, entraînée très jeune par Alberto Salazar, avait levé le voile en novembre 2019 sur ses pratiques très douteuses, sous forme d’un harcèlement sur les filles et femmes de son team, avec des remarques répétées sur leur corps et leur surpoids. Ce témoignage avait choqué tant cette jeune athlète semblait promise à un destin fantastique, mais s’était finalement retrouvée poussée vers la dépression par les attitudes hostiles et dédaigneuses de son coach.
Que vaut vraiment cette suspension à vie de SafeSport ? Les Américains les plus informés l’ont accueillie avec scepticisme, sa légitimité juridique s’avérant très attaquable si Alberto Salazar redevenait à nouveau très vindicatif. Et surtout, elle l’interdit dans un champ limité, celui des fonctions d’entraîneur dans des universités ou clubs, ou toute autre structure « officielle ». Mais elle ne limite en aucun cas sa possibilité de redevenir coach « privé » à l’issue de sa suspension sportive.
Sans oublier aussi l’éventualité qu’Alberto Salazar évolue en sous-main, sous le couvert de Pete Julian, son ex-assistant coach, qui assume officiellement le conseil à Safan Hissan. Il l’a ainsi amenée cet été au titre de double championne olympique. Avec en arrière-plan, l’éternel Salazar ???
Texte : Odile BAUDRIER
Photos: Gilles Bertrand et D.R.