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Le suivi médical du haut niveau, un outil de santé, pas d’anti-dopage

Les meilleurs athlètes français susceptibles d’intégrer l’Equipe de France font l’objet d’un suivi médical spécifique dans un cadre fixé par la FFA. Ce suivi longitudinal se place strictement dans une optique de surveillance de la santé des athlètes. Il peut ainsi être à l’origine d’une contre-indication à la pratique sportive. Le Docteur Jean-Michel Serra, responsable médical à la FFA, explicite les détails sur ce suivi, et les précautions à prendre.

analyses

Quel est l’objectif du suivi médical réglementaire ?

Les suivis médicaux s’inscrivent dans une optique santé pour détecter les éléments problématiques liés à l’entraînement. Il est important de s’assurer qu’il n’existe pas de répercussion sur la santé de l’athlète lorsqu’il pousse le corps dans des niveaux intensifs, qu’il s’agisse d’un jeune accédant au haut niveau ou d’un athlète aguerri aux intensités extrêmes. En particulier de vérifier qu’il ne souffre pas du surentraînement,  ou aussi d’autres problématiques de santé classique, car un athlète de haut niveau peut également présenter des dérèglements corporels de diverses natures. Il est important de s’assurer que le sport ne génère pas des pathologies.

Quels sont les athlètes concernés ?

Tous les athlètes figurant sur les listes ministérielles de haut niveau, publiées par le Ministère des sports. Ces listes se partagent en plusieurs niveaux : Elite-Seniors/Espoirs/Jeunes.  (*)

Selon le niveau, plus ou moins de moyens sont mis en œuvre. Au niveau médical, toutes les visites médicales sont identiques, qu’il s’agisse d’espoirs ou d’élite. La première visite médicale intègre un examen complet, et intègre aussi les examens cardiologiques, avec un ECG de repos. La deuxième visite s’effectue avant le début juin, elle intègre un état des lieux de toutes le parties du corps, et la vérification des changements éventuels par rapport à la première visite.

Ensuite, pour le bilan biologique, les espoirs connaîtront 1 seul bilan, en début d’année, et les autres catégories auront deux à trois bilans dans l’année.

Concernant les coureurs recherchant leur qualification au championnat d’Europe de marathon ou à la Coupe d’Europe, le suivi médical devait s’effectuer en préalable au marathon de qualification, en l’occurrence Paris cette année pour les trois marathoniens cherchant à se qualifier. Pour quelle raison ?

Pour le hors stade, la mise en œuvre du suivi médical est plus compliqué que pour l’athlétisme piste. Les athlètes doivent être licenciés suffisamment en amont des compétitions. Pour le hors stade, des coureurs peuvent se licencier à la dernière minute, sans avoir été inclus dans le suivi. Et ainsi, ils peuvent effectuer une préparation complète de marathon sans pour autant avoir eu la moindre visite. Donc pour prétendre à une sélection en équipe de France, les coureurs qui veulent se qualifier doivent au moins avoir fait une première visite médicale, pour s’assurer que leur niveau sportif leur permet de prétendre à ce genre d’entraînement. C’est ce qui a été fait pour les coureurs qui tentaient de se qualifier lors du Marathon de Paris, à l’identique de ce qui se fait pour les personnes licenciées et inscrites sur les listes de haut niveau ministériel. Ensuite s’ils réalisent les minima et se qualifient, ils devront se soumettre à une autre visite médicale.

Les analyses sont-elles à effectuer dans des laboratoires précis ?

L’objectif est de recourir à des laboratoires agréés. Pour des raisons de logistique, car ces laboratoires utilisent les mêmes automates, et car les analyses sont reçues en direct sur un logiciel à la FFA, permettant ainsi des interprétations plus faciles.

Qui effectue les analyses et que recherche-t-il ?

Les analyses sont vérifiées par le médecin chargé du suivi, le Docteur Depiesse. Il s’agit de s’assurer que l’on reste dans des valeurs compatibles avec l’entraînement de haut niveau, sans perturbations importantes.

Le suivi est-il utilisé pour la détection de dérives dopantes éventuelles ?

A l’origine, le suivi longitudinal comportait des aspects mixtes, de suivi de santé et de surveillance de dérives. Maintenant, les agences anti dopage effectuent les suivis biologiques, et sur le plan fédéral, il s’agit plus d’un suivi des perturbations liées à des intensités d’entraînement.

Les dérives éventuelles ne sont pas directement détectées. Même si certains paramètres biologiques sont utilisés par les agences anti-dopage, le système d’interprétation sur un seul paramètre ne permet pas d’avoir une présomption d’utilisation de produits illicites.

Le suivi médical permet de s’assurer que le sportif n’a pas d’anomalies particulières en rapport avec un problème de santé. Si c’est le cas, le médecin lui demande de s’arrêter, de se reposer, et de refaire un contrôle plus tard. Pour s’assurer que ce n’est pas en lien avec le surentraînement. Si les perturbations demeurent, il est demandé à l’athlète d’effectuer un examen auprès d’un spécialiste, dans le cas d’un trouble hormonal, hépatique, thyroïdien…

Parmi les paramètres interprétés, figure le taux d’hématocrite. Est-ce qu’un taux élevé a parfois conduit à réagir auprès de certains athlètes ?

Le taux d’hématocrite est vérifié. Si les athlètes sont dans les normes, le bilan ne change pas grand-chose sur leur suivi par la suite. Le seul paramètre de l’hématocrite n’est pas un critère qui permet de différencier quelqu’un qui aurait un problème de santé, d’un autre qui serait déshydraté, ou qui aurait une utilisation abusive de produits de type EPO. C’est toute la limite d’un paramètre comme le taux d’hématocrite. En tant que médecin, ça n’a pas de sens, et on ne peut pas avoir une présomption de problèmes liés à une conduite dopante.

Même si le taux élevé éveille des soupçons ?

C’est toujours compliqué. Pour les disciplines longue distance, si l’athlète ne s’est pas correctement réhydraté ou qu’il a fait un bilan à l’approche d’efforts conséquents, l’état d’hydratation va perturber l’hématocrite et faire monter le taux.  Le taux est un pourcentage et plus l’intérieur du corps est déshydraté, plus la concentration des globules à l’intérieur du prélèvement monte. D’où une anomalie qu’il faut analyser, pour voir si elle est liée ou pas à des troubles d’hydratation. Ensuite, il faut refaire un contrôle. Si les choses se normalisent, on n’a pas plus d’indicateurs. Soit l’athlète se situait dans une surcharge d’entraînement, et une hydratation pas adaptée. Soit il s’agissait d’autre chose. Mais il n’est pas possible de pouvoir démontrer quoi que ce soit. Les gens ont l’impression que les analyses biologiques du suivi médical font partie de l’arsenal répressif anti-dopage, mais cette capacité n’existe en aucun cas, sur le plan médical. La situation est complètement différente d’un suivi biologique effectué par les agences anti-dopage, avec un ciblage particulier de paramètres.

Les informations du suivi médical sont-elles transmises à la DTN, des entraîneurs nationaux ou demeurent-elles confidentielles ?

Si l’athlète a un souci avec un paramètre anormal, le médecin en charge du suivi formule une demande de contre-indication d’activité sportive. Il informe le Président d’une contre-indication à la pratique du haut niveau, du repos imposé à l’athlète, des contrôles à effectuer par la suite. Un bilan complémentaire ou plus poussé est prescrit pour s’assurer qu’il n’y a pas d’anomalies graves sur le plan santé. Et il faut vérifier que les paramètres se normalisent en arrêtant l’entraînement.

Combien d’athlètes sont concernés par le suivi ? Et combien d’interdictions temporaires de pratique ?

Il y a environ 800 athlètes sur les listes de haut niveau du Ministère. Un athlète figurant sur ces listes doit avoir un suivi. Le gros contingent est ceux des listes Espoirs, environ 500. Et chaque année, en général, très peu d’athlètes font l’objet d’une contre-indication. Environ 1 à 2 athlète par an affiche des paramètres dérivants.

 

Les listes ministérielles du haut niveau

Elite : 25 athlètes

Senior : 69 athlètes

Relève/jeunes : 168 athlètes

Espoirs : 500 athlètes

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