Un athlète accédant à un podium d’un Championnat de France n’est pas toujours soumis à un contrôle anti-dopage. Exemple avec Hassan Hirt, qui n’a pas reçu de notification pour le contrôle après sa deuxième place du France de cross. Alors, comment sont choisis les athlètes contrôlés sur une compétition ?
Morad Amdouni (1ER) – Yoann Kowal (3ème)- Florian Carvalho (4ème) – Vincent Luis (5ème) – Hassan Chahdi (6ème) – Jimmy Gressier (14ème) – Benjamin Malaty (15ème). Voilà les coureurs contrôlés après leur arrivée au Championnat de France. Ce qui correspond aux cinq premiers du Top 6. Dans lequel manque un seul athlète : Hassan Hirt…
Un « trou » qui a suscité quelques remarques acides, comme de la part de Jean-Claude Vollmer, entraîneur d’Hassan Chahdi, ulcéré qu’Hassan Hirt ne soit pas vérifié malgré sa place de deuxième, et qu’on s’attarde sur des coureurs placés derrière lui.
Pourquoi une telle situation ? Michel Marle, le responsable de l’anti-dopage à la FFA, n’était pas présent à Plouay. Mais il me l’avoue sans détour, il a été très mécontent de découvrir, a posteriori, qu’Hassan Hirt n’avait pas été intégré dans le dispositif anti-dopage de ce France par l’AFLD, tout en n’étant plus inclus depuis décembre 2015 dans le groupe cible AFLD obligé à une localisation quotidienne.
Bien évidemment dans ces réactions, pointe sous-jacente une irritation résultant du « statut » d’Hassan Hirt, un athlète suspendu pour dopage dans le passé. Hassan Hirt le sait fort bien, et s’en offusque très souvent, cette étiquette lui demeure accrochée. A l’arrivée, il expliquera d’ailleurs avoir entendu à plusieurs reprises sur le parcours les cris de « dopé, dopé… » à son passage, tout en soulignant que sur 90% du parcours, il s’agissait plutôt d’applaudissements.
Concernant Hassan Hirt, cette situation est d’autant plus paradoxale, que lors de son retour à la compétition après sa suspension pour contrôle positif, il avait fait l’objet d’un contrôle anti-dopage au Championnat de France de mars 2015 de St Quentin en Yvelines. Or ce retour avait été entouré d’un énorme scandale, Hassan Hirt avait pris le départ sans dossard, faute d’avoir trouvé un club acceptant de le licencier pour qu’il puisse disputer les cross de sélection et participer au France. Il avait alors été stoppé en pleine course par un juge officiel qui avait provoqué sa chute, avant qu’il soit évacué manu-militari du parcours. Malgré ce contexte très particulier, d’une compétition inachevée et courue en « clandestin », Hassan Hirt s’était vu notifier un contrôle anti-dopage, et avait été amené jusqu’au local de prélèvement, sans même avoir eu le temps d’être soigné pour la blessure subie en course…
Trois ans plus tard, cette absence au contrôle, qu’Hassan Hirt n’a évidemment pas choisie ( !), incite à s’intéresser à mieux comprendre comment s’effectuent les contrôles anti-dopage en compétition, et surtout à savoir pourquoi tout le podium d’un France n’est pas contrôlé ?
Le choix des contrôles, au hasard, ou ciblés
Michel Marle explicite le cadre de travail de tels contrôles : « La FFA fixe le nombre de contrôles souhaités sur une compétition. L’AFLD effectue à minima ce nombre, elle peut aussi l’augmenter. L’AFLD diligente les contrôles. Les méthodes de choix sont variées. Cela peut être fait au hasard, on peut dire par exemple 1er/3ème/5ème. Ou ciblé en fonction d’informations connues sur des athlètes. La FFA peut aussi donner son avis. » Voilà les grandes lignes, confirmant qu’il n’existe pas de règle de contrôle des trois médaillés d’un France.
Michel Marle l’admet, des bizarreries apparaissent parfois dans les choix, en raison du recours à la méthode au hasard. Pour lui, un autre point apparaît litigieux, le fait d’aller « chercher » des coureurs placés très loin dans les classements, dans une optique de santé publique. Avec comme conséquence, des contrôles positifs sans importance. Comme par exemple, récemment, le contrôle d’une coureuse valant 42’ sur 10 km, et qui s’est révélée positive pour avoir utilisé trop de ventoline. Avec au bout du compte, une relaxe prononcée par la FFA, au vu du traitement médical suivi par cette personne. Et conclusion sans appel de Michel Marle : « Ces contrôles ne servent pas à grand-chose sur le plan anti-dopage. Cela coûte cher pour rien ! Pour moi, il faut cibler sur les athlètes susceptibles de représenter la France au niveau international.»
Mais l’anti-dopage comportent quelques méandres, et on peut ainsi constater que la liste des personnes contrôlées durant une compétition n’est jamais rendue publique, et pas plus le nombre de contrôles subis par un sportif durant une saison. A l’opposé des Etats-Unis, où chaque fin d’année, la Fédération d’athlétisme rend compte par le menu de ces infos, établissant un hit-parade des athlètes contrôlés. En France, une telle transparence n’est pas de mise. Au nom de la protection de la vie privée…
Texte : Odile Baudrier
Photo : Gilles Bertrand