L’IAAF a adopté de nouvelles règles concernant les chaussures utilisables par les coureurs, en supprimant l’interdiction des technologies apportant un avantage. Une décision validant ainsi la chaussure « 4% » créée par Nike pour le projet Breaking 2, censée permettre une amélioration des performances de 4%.
Qui pouvait vraiment en douter ??? La chaussure 4% de Nike a été validée par l’IAAF, qui a changé ses règles d’habilitation des chaussures utilisables en compétition, pour autoriser tout type de modèle à condition qu’il soit « disponible pour tous dans l’esprit de l’universalité de l’athlétisme ».
Ainsi s’achève le débat autour de cette chaussure, contraire aux contraintes imposées jusqu’alors par la réglementation IAAF, qui interdisait toute technologie apportant un avantage au coureur. C’est à partir de cette règle que les chaussures Spira et leurs ressorts s’étaient vus interdites d’être portées par les compétiteurs.
Mais il paraissait impossible à l’IAAF de conserver cette ligne directrice et de prononcer du coup l’interdiction du modèle Nike, déjà testé l’été dernier aux JO de Rio par Galen Rupp, Shahane Flanagan, puis à l’automne par Kenenisa Bekele, et tout récemment par les trois coureurs du projet Breaking 2.
En quoi cette chaussure est-elle novatrice ? Par la plaque en fibre de carbone glissée dans la semelle, et qui est censée provoquer une propulsion plus forte, d’où une amélioration des performances, évaluée à 4% par les équipes techniques Nike.
La chaussure a-t-elle avantagé Eliud Kipchoge ??
Qu’en est-il vraiment ?? La réponse n’est pas si facile à donner, comme ont pu l’analyser plusieurs techniciens à l’issue de la course d’Eliud Kipchoge sur le circuit de Monza. Pour atteindre ce chrono de 2h00’25’’, plusieurs paramètres ont pu apparaître faciliter la tâche au Champion Olympique, et les divers observateurs semblent plutôt s’être accordés sur le fait que le principal avantage aurait été apporté par le drafting, provenant des pacers placés en escouade devant lui, et de la voiture Tesla, portant un immense chrono sur le toit, propices à protéger le Kenyan du vent.
L’avantage de la chaussure n’a pas été clairement identifié. L’entraîneur et chercheur Steve Magness le résume parfaitement par cette phrase : « Peut-on dire que la chaussure a aidé Kipchoge et a gêné Desisa ??? Certainement pas ! »
Mais Steve Magness n’a pas manqué d’analyser les performances réalisées par les différents coureurs qui ont déjà eu le privilège de porter ce modèle, Galen Rupp, Jordan Hasay, Alistair Cragg, Kenenisa Bekele, Shahane Flanagan, Lilesa Disesa, Tadese, Eliud Kipchoge,
Pour conclure que certains d’entre eux ont réalisé mieux qu’espéré, et d’autres beaucoup moins bien. D’où cette idée que l’effet est variable selon les uns et les autres. Le manager hollandais Joos Hermens, lui-même, a admis que ce modèle « Vaporfly 4% » avantageait visiblement Eliud Kipchoge, mais pas ou moins Kenenisa Bekele.
Immédiatement après le marathon du circuit de Monza, les tests réalisés par une équipe de l’Université du Colorado ont été présentés à Alex Hutchinson, le journaliste de Runner’s World qui a suivi de manière privilégiée toute l’opération Breaking 2.
Les gains varient entre 2.7% et 5.3%
Ces tests ont permis la comparaison du modèle Vaporfly 4%, avec la Nike Zoom Streak 6, et l’Adidas Adios Boost 2, qui était le modèle porté par Dennis Kimetto lors de son record du monde (2h02’57’’). Ils ont été effectués par 18 coureurs d’élite, qui ont tous couru sous les 30 minutes en altitude (à Boulder), et avec une VO2 Max moyenne de 72.1. Pour faciliter les comparaisons, les modèles Nike ont été alourdis de 50 grammes, pour atteindre les 250 grammes de l’Adios 2.
Conclusion du travail de ces universitaires (financé par Nike) : l’amélioration des performances serait en moyenne de 1.3%, avec des résultats très contrastés, puisqu’évoluant entre 2.7% et 5.3%. Ce qui confirme que les gains ne sont pas identiques pour tous
Cet avantage de 4% annoncé est de toute façon à considérer avec beaucoup de précaution. Car comme le conclut Alex Hutchinson, qui peut croire qu’à Monza, Eliud Kipchoge aurait couru 4% de temps en plus que son chrono de 2h00’25’’, avec un autre modèle que la Vaporfly 4% ?? Cela signifierait alors qu’il se serait contenté d’un temps de 2h05’14…
- Texte : Odile Baudrier
- Photo : D.R. Nike