Mounir Acherki vient d’être suspendu pour 4 ans par l’AFLD. Fin 2015, le coureur avait été condamné par le tribunal de Colmar à 4 mois de prison avec sursis pour la détention de produits dopants. Mais la FFA ne s’était pas alors emparée de cette affaire étonnante, dans laquelle aucun contrôle positif n’avait été enregistré, même si Mounir Acherki avait reconnu avoir utilisé de l’EPO au printemps 2014 et début 2015. Jusqu’alors, Mounir Acherki n’avait reçu aucune sanction sportive, et après une longue absence, il avait même effectué son retour lors du semi-marathon de Mulhouse le 2 avril 2017….
Quatre années de suspension, du 15 avril 2017 au 15 avril 2021. C’est la sanction prononcée par l’AFLD à l’encontre de Mounir Acherki, pour faire la suite de la décision judiciaire prise fin 2015 par le tribunal de Colmar, avec 4 mois de prison avec sursis. Une suspension très longue à être décidée et qui, par un drôle de timing, arrive juste au moment où Mounir Acherki venait de retrouver la compétition…. Le coureur avait disputé le 2 avril le semi-marathon de Mulhouse, qu’il avait remporté. Sa victoire avait suscité une grande émotion en Alsace, d’autant qu’elle survenait pratiquement au moment où tombait le contrôle positif pour cocaïne d’une autre Alsacienne, Latifa Schuster.
A Mulhouse, Mounir Acherki renouait avec la compétition, il n’avait plus été présent depuis le 6 juin 2015, pour le 10 km de Kruth. A peu près au moment où les rumeurs gonflaient à son encontre. Et c’est à l’automne suivant qu’allait éclater au grand jour l’affaire qui l’amenait fin novembre au Tribunal de Colmar pour répondre des faits de détention de produits dopants, et d’usurpation d’identité. Une histoire très étonnante, apparaissant à la suite d’achats d’EPO effectués par Mounir Acherki sur un site internet à l’étranger beststeroïd.shop. Et c’est en fait la justice qui s’était saisie de l’affaire suite à une plainte portée à l’encontre de Mounir Acherki, par une athlète de son club, et amie proche, Vanessa Our, qui l’accusait d’avoir usurpé son identité pour ses livraisons d’EPO…
Car en réalité, l’athlète n’avait jamais pu être contrôlé positif, malgré de nombreux contrôles, y compris inopinés, diligentés par Guillaume Zekri, le délégué régional de l’AFLD. Celui-ci, présent lors de l’audience de Colmar, nous avait fait part de ses suspicions remontant à plusieurs années, et bien sûr, les performances récentes de Mounir Acherki avaient particulièrement attiré son attention, surtout son 3’42’’39 sur 1500 m établi au printemps 2014, puis ses 29’10’’ du 10 km de la Prom’Classic.
Deux cures, mais six commandes d’EPO
Deux résultats peu en relation avec son niveau des années précédentes, et après sa condamnation, Mounir Acherki nous avait avoué que ces deux chronos avaient été obtenus après une cure d’EPO, l’une effectuée au printemps 2014, l’autre en décembre 2015. Selon lui, il n’avait eu recours à l’EPO qu’à deux reprises. Pourtant les informations révélées par l’enquête de police faisaient état de commandes plus importantes, le Président du Tribunal mentionnant 6 commandes variant entre 235 et 976 euros. Une distorsion laissant entrevoir plus qu’une simple consommation personnelle, mais Mounir Acherki a toujours refusé nier être en relation avec d’autres personnes, et constamment soutenu la version d’un acte effectué seul et seulement pour lui.
Pour justifier ses dérives, Mounir Acherki avait eu recours à un argument étrange, celui de vouloir mettre en avant le club de CAC 10 qu’il avait créé deux ans plus tôt, avec Saber Salah, avec la volonté d’animer les quartiers ouest de Colmar. Et même dans l’enceinte du tribunal, il avait soutenu cette idée, de faire parler de lui avec ses performances, pour que son club en retire plus de visibilité.
A l’issue de ce passage au tribunal, Mounir Acherki nous avait alors affirmé qu’il avait tourné la page de la course à pied, et qu’on ne le reverrait plus en compétition. Dans le même temps, Michel Marle, Monsieur Dopage à la FFA, devait admettre qu’en réalité, rien ne lui empêchait de reprendre la compétition. Cette affaire n’avait alors en effet suscité aucune réaction de la FFA qui ne s’était pas portée partie civile, et aucune instruction n’avait été conduite par la commission disciplinaire. La FFA avait finalement saisi l’AFLD au mois de juin 2016, et ce n’est que début mars 2017 que celui-ci avait été convoqué pour passage devant la commission de l’AFLD, à laquelle il ne s’était pas présenté le 6 avril.
Près d’un an et demi plus tard, l’affaire rebondit simultanément. D’abord avec le come back de Mounir Acherki, et sa victoire à Mulhouse. Puis avec la publication en ce début mai sur le site de la FFA de la décision prise par l’AFLD en date du 6 avril 2017, et qui prend effet le 15 avril, avec une suspension pour une durée de 4 ans. Il était temps…
- Texte : Odile Baudrier
- Photo : Gilles Bertrand
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