Le CIO a sanctionné deux nouveaux athlètes, suite à la réanalyse de leurs échantillons des Jeux Olympiques de Pékin : Nesta Carter, (avec par ricochet la perte de la médaille d’or pour le relais de la Jamaïque, dont Usain Bolt) et Tatayana Lebedeva. La Russe avait conquis à Pékin deux médailles de bronze, au triple et à la longueur. Elle a été l’une des athlètes les plus prolixes de la Russie, et également sénatrice dans son pays, elle s’était montrée très hostile à la lutte anti-dopage.
Rarement sur le site All-Athletics, un palmarès comporte autant de lignes que celui de Tatayana Lebedeva… Les titres et les podiums y pullulent, dévoilant sa grande domination sur le triple saut et la longueur pendant plusieurs années. Son seul palmarès olympique compte pas moins de cinq médailles, l’or à la longueur à Athènes, l’argent au triple et à la longueur à Pékin, et au triple à Sydney, le bronze au triple à Athènes. En quatre olympiades disputées, entre 2000 et 2012, il n’y a qu’à Londres qu’elle était repartie bredouille, 10ème au triple saut. Tatayana Lebedeva avait alors déjà 36 ans.
Côté championnat du monde, l’histoire est toute aussi belle, elle rafle son premier titre mondial à Edmonton en 2001, et elle renouvelle à Paris et à Osaka, terminant en argent à Osaka et à Berlin. Sans oublier bien sûr le record du monde du triple en salle qu’elle s’adjuge en 2004, et qui demeure encore scotché sur les tablettes.
Mais ce palmarès vient de se faire dépouiller brutalement, avec l’annonce de deux tests positifs des JO de Pékin, provoquant la perte de ses deux médailles d’argent. Le retesting a été fatal à la sauteuse russe, révélant la présence de déhydrochlorméthyltestostérone ou plus simplement du turinabol. Ce produit est un stéroïde anabolisant, largement utilisé dans les années 70 par le bloc de l’Est, Allemagne de l’Est en tête, et très efficace pour augmenter la masse musculaire et la force.
Aux JO de Pékin, le turinabol n’était pas détectable, mais les tests se sont améliorés pour permettre d’arriver à sa détection dans les échantillons prélevés à l’époque sur Tatyana Lebedeva.
Tatayana Lebedeva et Yelena Isinbayeva, la théorie du complot anti-Russie
C’est un « monstre » sacré de l’athlétisme russe qui se voit ainsi touché, d’autant que Tatyana Lebedeva avait enfilé une casquette très officielle, celle de Sénatrice pour la région de Volgograde et qu’elle faisait partie des athlètes les plus offensifs face aux rapports Mc Laren et aux décisions d’exclusion de la Russie des JO de Rio. Au printemps dernier, auprès du journal « Ria Novosti, Tatyana Lebedeva criait ainsi au complot politique du lobby anglo-saxon hostile à la Russie.
Avec Tatyana Lebedeva, il s’agit du 32ème médaillé russe se voyant retirer sa médaille olympique. Une triste confirmation de l’étendue du dopage dans ce pays qui tombe quelques jours après la diffusion par la télévision allemande ARD d’un nouveau documentaire de Hajjo Seppelt réalisé en Russie. Et cette nouvelle production sonne à charge sur l’athlétisme russe, avec l’affirmation par Andrey Dmitriev, un coureur de 1500 mètres, que les coachs russes qui devraient être suspendus pour des faits de dopage continuent tout à fait normalement leur fonction d’entraîneur.
La diffusion de ce sujet a beaucoup irrité Yelena Isinbayeva, qui n’a pas hésité à pointer du doigt ce nouveau lanceur d’alerte, pour l’inciter à venir témoigner de ces faits auprès des autorités de son pays plutôt qu’auprès du journaliste allemand, que quelques voix s’élèvent pour commencer à trouver trop ouvertement hostile à la Russie….
Texte : Odile Baudrier
Photo : Gilles Bertrand