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Rififi au Kenya après les révélations sur le dopage

La diffusion du documentaire de Hajo Seppelt et de l’article du Sunday Times sur les dérives du dopage au Kenya a causé une vive polémique dans le pays.  Le centre de préparation de Lornah Kiplagat à Iten se voit mis en cause, il servait de base aux athlètes britanniques, et trois Britanniques apparaissent dans les sujets réalisés, pour leur recours à des pratiques douteuses, suscitant un vrai emballement médiatique en Grande Bretagne…  Pour la France, les coureurs en stage ce printemps dans le cadre du plan marathon s’étaient, eux, installés dans un autre centre à proximité d’Iten.

 

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Ca tousse et ça gronde au Kenya après la diffusion du documentaire de Hajo Seppelt et l’article du Sunday Times. La fronde est forte, emmenée par Saddique Shaban, un journaliste kenyan, qui s’illustre sur Twitter après plusieurs années passées à la rédaction des Sports de la télévision KTN. Il y livre des opinions tous azimut, souvent très engagées, et le documentaire réalisé lui a inspiré des réactions de vive hostilité, contre les équipes de journalistes à l’origine des nouvelles accusations d’un dopage très répandu au Kenya. La télévision kenyane lui a donné la part belle, avec un débat sur ce thème organisé par NTV Kenya, chaîne de référence au Kenya.

SADDIQUE SHABANLes radios et sites internet s’en sont mêlés aussi, avec plusieurs parutions visant à éclairer d’une manière différente la réalisation de ces documentaires. En particulier, le site « Citizen » a  publié le témoignage de Frederic Lemishen Ngoyon, présenté dans les sujets comme un pacemaker pour les athlètes en Europe, et qui sur les images diffusées, guide les équipes de tournage vers le médecin douteux d’une « Herbal Clinic ». Mais ce Frederic conteste le rôle qui lui est donné, et explique avoir été dupé par les journalistes allemands et anglais, qui lui auraient fait des promesses par rapport au marathon de Londres, en échange d’informations de sa part. Toutefois, les explications de cet homme apparaissent quelque peu nébuleuses quant à sa présence dans le quartier d’Eldoret où le praticien de l’Herbal Clinic prescrirait EPO et autres dopants…

Lornah Kiplagat, un business menacé par ces accusations ?

Le démenti de Pieter Langerhosrt auprès du Telegraph apparaît plus étayé. Le patron du Centre d’Entraînement de Haute Altitude de Iten rejette en bloc toutes les accusations véhiculées par le sujet, et en particulier, la découverte dans une poubelle près du centre de boîtes d’EPO et de seringues usagées.

L’enjeu est de taille pour Lornah Kiplagat, qui a bâti ce centre devenu la référence au Kenya, servant de base d’accueil  à des athlètes du monde entier. Au printemps 2015, lors de l’inauguration de la piste d’Eldoret, nous avions rencontré la coureuse devenue hollandaise par son mariage. La jeune femme avait affiché une position ferme sur le dopage, en exigeant des sanctions à vie des athlètes concernés et la suspension de leur entraîneur.

Concernant son centre, son opinion était bien tranchée : « Le centre accueille des individuels sous leur propre responsabilité. Qu’ils soient kenyans ou étrangers, s’ils se dopent, c’et leur responsabilité, pas la nôtre. Mais nous n’avons jamais eu de problème ». Quant à la question de savoir si le problème du dopage au Kenyan avait un impact sur son business, Lornah Kiplagat avait complètement démenti.

Mais une année plus tard, la sarabande s’est enflammée. Surtout avec la révélation dans le documentaire ARD que trois athlètes britanniques auraient été des clients du « Herbal Docteur ». Des accusations que l’agence anti-dopage britannique prenait très au sérieux, au point d’envoyer sur place une équipe d’enquêteurs, avec en ligne de mire, la poursuite ou non de la collaboration de la Fédération Britannique avec le Centre Kiplagat. Il faut dire que cette affaire fait les gros titres de la presse britannique très curieuse de connaître les noms de ces trois athlètes douteux…

Les Français installés au Kerio Camp

Iten accueille chaque année des centaines d’étrangers à la recherche de l’altitude et des conditions d’entraînement optimales durant l’hiver dans leur pays. La petite ville avait ainsi été choisie par Jean François Pontier et Philippe Rémond ce mois de février pour le stage des coureurs du plan marathon, réunissant Timothy Bommier, Badre Zioini, James Theuri, Mickaël et Damien Gras, Corinne Herbreteau, et deux steeplers, Ophélie Claude Boxberger et Yohan Kowal , ainsi qu’un petit groupe de jeunes espoirs, incluant Anthony Pontier déjà présent l’année dernière.

La petite délégation française s’était, elle, installée au Kerio View Camp, appartenant à l’ancien marathonien belge, Jean Paul Fourrier, qui a été le premier centre ouvert à Iten, dès 1995. Comme tous les athlètes du monde entier, c’est sur la piste de « Kamariny » qu’ils effectuaient leurs séances de piste. Et Philippe Rémond  avoue : « Après la séance, on n’avait qu’une envie, rester pour regarder le show. Car ce n’est pas rien de voir 150 athlètes sur la piste en même temps ! »

Une prolixité à la Kenyane, à considérer comme suspecte ????…

  • Texte : Odile Baudrier
  • Photo : Gilles Bertrand