Aller au contenu

Un gros trafic d’EPO démantelé en Espagne

La police espagnole démontre une nouvelle fois son efficacité avec le démantèlement d’un énorme trafic d’EPO mené depuis Barcelone dans toute l’Europe à travers des sites internet. L’affaire concerne plus de 260 sportifs, de différents sports, de niveau plutôt intermédiaire. Mais quelle sera la suite sportive à cette enquête ??

Un trafic d’EPO juteux durant depuis plus de 10 ans, basé sur une arnaque toute simple menée par un infirmier espagnol à Cadix : la commande de l’EPO en double. Avec une partie pour le véritable malade et l’autre moitié destiné à alimenter ce marché noir s’appuyant sur plusieurs sites internet.

La police espagnole peut se targuer d’une très belle opération menée en toute discrétion depuis le printemps dernier avant d’exploser en cette fin janvier 2020, pour confirmer que l’EPO demeure un produit très recherché par les sportifs de tous les niveaux, avec 260 clients recensés par l’enquête.

Car même si la confidentialité demeure sur les noms des sportifs concernés, il apparaît qu’il ne s’agit pas d’athlètes de top niveau, mais plutôt des athlètes populaires, cyclistes, spécialistes de cross et de trail, triathlètes, de nombreux vétérans, et aussi un ancien sélectionné olympique espagnol devenu entraîneur.

C’est à la suite d’informations communiquées en 2017 à l’AEPSAD, l’agence espagnole anti-dopage, par des sportifs contrôlés positifs à l’EPO qu’ont été découverts les sites internet de commande et leur interaction avec l’hôpital et la clinique de Cadix, où s’effectuait le détournement de l’EPO pour revente.

Un trafic financé par l’Etat espagnol

Les médias espagnols ont largement fait le relais de cette opération HIPOXIANET, particulièrement choquante pour le grand public espagnol stupéfaite de découvrir que ce trafic d’EPO a été entièrement financé par la Santé Publique d’Andalousie, l’équivalent de la Sécurité Sociale française.

Le montage s’appuyait sur un ressortissant serbo-hongrois disposant d’un passeport slovène et installé à Barcelone, exploitant sept sites internet, epototal.eu, epobest.com, steroides.fr, eesteroides.com, steroidihr.com, prônant l’utilisation de l’EPO, avec des conseils diffusés en plusieurs langues.

L’enquête a été compliquée du fait que les sites web créés étaient installés en Islande et New Jersey, où la réglementation est plus souple que dans d’autres pays, et que les communications entre l’acheteur et le vendeur s’effectuait avec des réseaux de messagerie instantanée cryptés, via un numéro de téléphone autrichien. Les paiements s’organisaient avec des sociétés de transfert d’argent basées aux Etats-Unis, des virements vers des comptes étrangers, ou encore des cryptomonnaies, comme le BitCoin, qui autorisent l’anonymat dans les transferts.

Les quantités sont impressionnantes, avec entre janvier 2016 et juin 2019, environ 5100 containers détournées, de l’EPREX de forte concentration (8000 à 10000 UC), vendue 250 euros la seringue. L’affaire était plus que juteuse, il s’y ajoutait aussi un business autour des stéroïdes. En témoigne le chiffre de 800.000 euros saisis sur divers comptes bancaires et 70.000 euros saisis lors de la perquisition menée à Barcelone.

Des sanctions sportives compliquées à prendre

Et maintenant, quelle sera la suite sportive à cette affaire ? Les choses s’annoncent très compliquées. Les noms des sportifs identifiés durant l’enquête seront communiqués à l’agence anti-dopage espagnole qui traitera les cas espagnols et transmettra les autres noms à l’AMA pour envoi vers les autres agences anti-dopage.

Les sanctions théoriques sont de 4 ans, pour possession de produits dopants. Mais cela imposera qu’il soit démontré que l’EPO a bien été reçue par le sportif qui a effectué la commande. Les batailles juridiques s’annoncent complexes !

  • Texte : Odile Baudrier
  • Photo : D.R.