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Sophie Duarte, « je veux être championne de France de cross »

Sophie Duarte lors des Inters d'Occitanie à St Juéry

Sophie Duarte lors des Inters d’Occitanie à St Juéry

Sophie Duarte a orchestré sa saison hivernale, dans l’objectif du Championnat de France de cross. La Toulousaine s’est ainsi préparée de manière atypique, sans stages à l’étranger, sans grand cross dans la 2ème moitié de saison, dans l’optique de conquérir son 2ème titre de Championne de France, après celui de 2015, et alors que le titre 2014 lui avait été soufflé par Laila Traby, quelques mois avant son contrôle positif. 

 

« Je vise le titre ». La phrase est sans ambiguïté. Dans le milieu de l’athlétisme, Sophie Duarte est connue pour son franc parlé, qui ne lui vaut pas que des amis. Et en ce début d’année 2017, elle ne veut pas jouer la langue de bois. Elle dévoile clairement ses ambitions : retrouver à nouveau un 2ème titre de championne de France de cross après celui de 2015.

Une médaille d’or qui s’est très longtemps refusée à elle. Les palmarès successifs des championnats de France en témoignent. Elle a été abonnée à la 3ème place, comme en 2011, 2012, 2013. Jusqu’cette 2ème place du France 2014 derrière une certaine Laila Traby, qui allait être quelques mois plus tard contrôlée positive à l’EPO…

Sophie Duarte 2ème derrière Laila Traby en 2014

Pour ce France 2014, Sophie Duarte arrive pourtant en ultra-favorite, à peine trois mois après avoir empoché le titre de Championne d’Europe de cross 2013. Mais à Salon de Provence, Laila Traby va la supplanter avec une aisance qui donne à beaucoup d’observateurs une grande impression de malaise, choqués par son final très vindicatif après une course attentiste menée dans la foulée de Sophie Duarte, sa capacité à évoluer à allure très rapide sans signe d’essoufflement, ou encore son extrême fraîcheur à l’arrivée…

Les conclusions paraissent faciles, mais ce n’est que quelques mois plus tard, en novembre, que l’urine et le sang de Laila Traby parlent, avec la détection d’EPO. Après son titre en cross, l’athlète licenciée à Martigues avait eu le temps d’empocher un autre titre de Championne de France, sur le 5000 m, et une médaille de bronze sur 10000 m aux Championnats d’Europe de Zürich. Justement dans cette course de Zürich, Sophie Duarte sort par la petite porte, elle abandonne, elle confiera plus tard avoir été ulcérée de se retrouver une nouvelle fois à côté d’une Laila Traby, évoluant à vive allure sans respiration…

sophie duarte 2

Finalement en novembre, une certaine justice se fait jour, et en avril 2015, Laila Traby reçoit une suspension de trois ans. En septembre 2016, l’affaire rebondit, cette fois sur le plan judiciaire, suite à l’enquête menée par les gendarmes de l’OCLAEPS, et Laila Traby se voit mise en examen pour des faits d’acquisition et détention de produits dopants. Avec à ses côtés dans cette procédure judiciaire, deux personnages surprenants. D’abord, Salim Ghezielle, le frère de son ex-entraîneur Nordine, également ex-mari de Bouchra Ben Thami Ghezielle, elle-même contrôlée positive en 2008. Et ensuite, Charaf Belamkademm, un athlète de niveau régional, également entraîneur et masseur, très actif sur la zone de Clermont Ferrand où il réside.

Sophie Duarte, 3 fois 3ème avant d’être 2ème, puis de gagner

Il est certain que l’affaire Traby n’est pas achevée, et l’avenir devrait lever le voile sur d’autres personnes impliquées dans son dopage et le trafic de produits dopants. Mais il est quasi sûr aussi qu’il y a peu de chances que l’issue judiciaire ait un impact sur le plan sportif, et en particulier sur les performances réalisées durant cette année 2014, où elle a enchaîné des résultats tout à fait incroyables pour elle… Ce titre de Championne de France de cross en fait partie, Laila Traby ne s’était jusqu’alors qualifiée qu’une fois au France de cross, en 2013, pour terminer 10ème. Cette même année 2013, où Sophie Duarte conquérait, elle, pour la 3ème fois la 3ème place derrière Clémence Calvin et Christelle Daunay, ses rivales de longue date.

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A force de monter sur le podium sans accéder à la plus haute marche, le titre de Championne de France a fatalement pris une grande importance pour Sophie Duarte, d’où sa volonté de se focaliser sur ce cru 2017. Car Sophie ne le dissimule pas : « Je reviens de loin. » D’où sa volonté de disputer dans cette 2ème partie de saison, toutes les étapes officielles du cross, les départementaux, les demi-finales, les régionaux. Une approche assez rare chez les athlètes d’élite, souvent absents de ces championnats successifs, pour n’apparaître qu’au France.

Pas de stage au soleil juste avant un France de cross dans le froid

Mais Sophie se montre réaliste : « Quand on atteint le fond, il faut savoir d’où on vient. Je reviens à la base, pour remonter les échelons. » C’est aussi dans ce même esprit de pragmatisme qu’elle a refusé tous les stages proposés à l’étranger, Portugal ou Kenya, et avec bon sens, elle explique : « On recherche l’exotisme. Mais quand on vise un championnat de France qui a lieu fin février, ce sera un climat européen. Et moi, j’ai fait des erreurs dans le passé, je ne suis pas sûre de pouvoir m’adapter et revenir 3 jours avant. »

Elle a donc reproduit un schéma qui lui a très bien réussi dans le passé, aux côtés de David Heath, son flegmatique coach britannique, au milieu de son groupe d’athlètes du CA Balma, avec lesquels elle a enchaîné des séances de grande qualité, qui lui apportent la certitude qu’elle est maintenant dans la même forme qu’en 2013.

Sophie Duarte

En quelques semaines, elle a repris une totale confiance en elle, pour en finir avec une année 2016 tellement décevante, avec cette blessure au fessier, qui la perturbe, la fait stopper sur son premier marathon, la retarde dans sa préparation, surtout qu’il s’y ajoute une allergie au pollen qu’elle ne parvient à guérir qu’en s’exilant plusieurs semaines à Font Romeu.

10 ans de haut niveau à Toulouse

Sans oublier aussi qu’à ces aspects physiques, il s’est greffé une certaine lassitude face à l’entraînement, qu’elle avoue : « Cela fait 10 ans que je fais du sport de haut niveau. Ce sont toujours les mêmes choses, les mêmes gens. Heureusement, j’ai trouvé mon équilibre avec de nouveaux partenaires ». Elle assume maintenant une mission de consulting au sein de la société i-run, le leader français de la vente sur internet dans le running : « Je travaille sur la dynamique d’entreprise. Je me sers du sport pour tout ce qui est cohésion d’entreprise. »

Autant d’atouts pour se relancer, et pour retrouver une certaine sérénité, qu’elle avait perdue. Tout simplement, parce que, explique-t-elle : « Le plus dur est quand on a été tout en haut, c’est de rebondir quand on redescend en bas. C’est très difficile à vivre. Cela m’est déjà arrivé en 2010-2011, j’avais connu deux années très très dures. Puis derrière, j’ai fait mes meilleures années. Alors, je m’accroche…. »

 

  • Texte : Odile Baudrier
  • Photo : Gilles Bertrand