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L’affaire Salazar, un tourbillon médiatique

Après les révélations sur l’utilisation de produits dopants par Alberto Salazar et Galen Rupp, les deux hommes se sont bornés à un laconique communiqué de protestation. Un véritable tourbillon médiatique est apparu, de multiples personnes s’exprimant sur cette affaire. Alberto Salazar préparerait une défense plus solide. L a Fédération Britannique affirme vouloir vérifier les échantillons de Mo Farah.

Alberto Salazar

Alberto Salazar

La presse du monde entier a fait état des révélations contenues dans le documentaire de la BBC et dans l’article de Pro Publica sur les pratiques douteuses d’Alberto Salazar et de Galen Rupp. Mais aux Etats-Unis et en Angleterre, on peut parler d’une déferlante médiatique…

Cela part dans tous les sens, en particulier en Angleterre, et les commentaires autour de Mo Farah ont atteint des sommets. Paradoxalement à considérer que le Britannique n’est pourtant mis en cause à aucun moment dans les sujets BBC/Pro Publica… Mais la polémique ne pouvait évidemment l’épargner. La controverse s’est encore gonflée après son retrait du meeting de Birmingham et sa décision de repartir à Portland, auprès d’Alberto Salazar, sous le prétexte d’obtenir des explications de celui-ci sur les éléments douteux dévoilés.

Paula Radcliffe, Seb Coe, Steve Cram, Jenny Simpson, Christine Ohuruogu, Jenny Meadows… Tous y sont allés de leurs commentaires, souvent diamétralement opposés. Mais c’est le Président de la Fédération UK qui a donné le coup de grâce, avec l’annonce que les échantillons sanguins de Mo Farah et ses données médicales allaient être vérifiées, pour s’assurer de leur « propreté », et le conseil donné au double champion olympique de se tenir à distance de son coach le temps que cette affaire se clarifie.

Alberto Salazar très discret

Pendant ce temps-là, à Portland, les deux principaux protagonistes de l’affaire sont demeurés étonnamment discrets. Deux jours après la diffusion du documentaire, Alberto Salazar et Galen Rupp ont livré un très laconique communiqué de protestation, visiblement rédigé en commun ou plutôt par la même personne. Le coach a ensuite annoncé préparer des documents à présenter pour faire valoir sa bonne foi. Et six jours plus tard, c’est du côté du quotidien britannique le Guardian qu’il s’est tourné pour à nouveau protester, en quelques mots.

Dans le documentaire lui-même, le coach et l’athlète n’avaient pas réagi aux accusations portées, Alberto Salazar s’était contenté de livrer tardivement à Pro Publica une justification sur l’utilisation par Galen Rupp de « Testoboost », un supplément alimentaire qui serait autorisé, et qu’il prenait pour contrebalancer les effets de la prednisone (corticoïdes) nécessaire pour soigner son asthme.

L’ex-coach Bob Williams soutient Alberto Salazar

Ce « vide » a conduit la presse américaine à interroger diverses personnes susceptibles de parler de ce sujet. Alors qu’à l’exception bien sûr du couple Goucher (témoins dans le documentaire), les ex-athlètes du Nike Oregon Project sont demeurés absents des débats, probablement interdits de parler par des clauses de leurs contrats, deux anciens coachs du projet ont livré leurs commentaires, et leurs deux versions s’opposent diamétralement.

Bob Williams, présent dans l’équipe d’Alberto Salazar, entre 2004 et 2005, s’insurge dans les colonnes de l’Oregon/Oregon Live, contre les accusations proférées à l’égard de son ancien boss. Pour lui, le coach se bornait à utiliser des méthodes d’entraînement sophistiquées et une récupération très soigneuse pour maximiser les bienfaits de l’entraînement, selon les techniques par Salazar et le spécialiste Dave McHenry, qui seraient selon lui deux pionniers dans l’entraînement en sécurité et légalement.

L’autre ex-coach John Cook accuse sans livrer de noms

A l’opposé, John Cook paraît valider les éléments du documentaire. Il a été actif dans le team du NOP pendant 18 mois, entre 2003 et 2005. Mais la lecture attentive de l’interview publiée dans « Runners World » dévoile beaucoup de sous-entendus, plus que d’affirmations claires et précises. John Cook apparaît maître dans l’art d’évoquer des pratiques douteuses sans les citer clairement, et en particulier sans les lier directement à Alberto Salazar.

Dans ses réponses, on découvre un contexte de recherche de performances à tout prix, et John Cook dévoile ainsi la recette pour obtenir d’un médecin la prescription d’un inhalateur anti-asthme. Avant de s’insurger : « Je ne pense pas que tout le monde a un problème de thyroïde. Je ne pense pas que tout le monde a un problème d’asthme. » Toutefois, les propos demeurent très généraux, jamais rattachés à des noms en particuliers.

Avec en final, le sentiment que l’ex-coach, désormais retraité, dispose de nombreuses informations qu’il ne souhaite pas livrer, et qui lui font tout de même révéler qu’avoir intégré le Nike Oregon Project a été la plus grande erreur de sa vie, ou encore insister sur le fait que les contrôles non-positifs ne signifient pas l’absence de dopage ou encore que « les chimistes gagneront toujours »….

 Texte : Odile Baudrier
 Photo : Gilles Bertrand