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Dopage : Anouar Assila, mis en cause pour passeport biologique douteux

L’affaire Anouar Assila rebondit avec la convocation de l’athlète devant la FFA en raison d’irrégularités dans son passeport biologique constatées par les experts de l’IAAF. Les justifications de ces irrégularités n’ont pas convaincu l’IAAF, qui a suspendu Anouar Assila à titre conservatoire, et la FFA entame maintenant la procédure en vue d’une sanction. Il y a quelques mois, Anouar Assila avait été relaxé dans la procédure lancée à son encontre en 2016 pour refus d’un contrôle anti-dopage inopiné.

Anouar Assila

Anouar Assila

Anouar Assila pensait bien être sorti d’affaire depuis qu’au mois de février dernier, il s’était vu relaxer par l’AFLD de l’accusation d’un refus de contrôle anti-dopage inopiné en son domicile au mois de février 2016.

Mais les choses ont tourné pour lui dans une toute autre direction avec la constatation d’irrégularités dans son passeport biologique, révélant des pratiques douteuses. En juillet, l’IAAF demandait à la FFA de transmettre à l’athlète le constat établi par les trois experts spécialistes du passeport biologique, demandant à l’athlète de justifier de ces irrégularités. Ce qu’Anouar Assila, et son avocat, effectuaient auprès de l’IAAF, courant août.

Mais les explications fournies par l’athlète n’ont nullement modifié le point de vue du trio d’experts, qui maintenaient leur conviction de l’usage de produits dopants, et dans la foulée, l’IAAF prononçait courant septembre à l’encontre d’Anouar Assila une suspension à titre conservatoire. Et c’est tout récemment que la FFA a pris la décision de convoquer Anouar Assila devant sa commission disciplinaire pour prendre une décision, qui sera plus que probablement celle d’une sanction, les avis des experts IAAF en passeport biologique n’étant quasiment jamais remis en cause (avec une seule exception, celle du Slovaque Matej Toth).

C’est en réalité dès le mois de mai 2016 que ces irrégularités étaient apparues, mais le secret avait été très bien gardé, le temps que tous les éléments nécessaires au lancement d’une procédure officielle soient réunis. Et cela n’a pas été facile de boucler ce dossier, pour obtenir un ultime prélèvement permettant d’établir la preuve de variations anormales des taux sanguins.

Paradoxalement, c’est justement le jour où Anouar Assila est venu témoigner devant la commission disciplinaire de l’AFLD que ce prélèvement a pu être recueilli. L’opération avait en effet très bien montée par Damien Ressiot, le patron des contrôles à l’AFLD, pour que les contrôleurs de l’IAAF patientent derrière la porte, et se présentent à Anouar Assila à sa sortie. Dès lors, il n’était pas possible au coureur du Mans de se défausser, et il se devait de les suivre dans un hôtel voisin pour se soumettre au prélèvement. Selon nos informations, Anouar Assila aurait même joué de la provocation, en déclarant aux préleveurs que s’ils s’étaient présentés chez lui, il ne leur aurait pas ouvert la porte…

Une bonne défense pour obtenir la relaxe

Une manière très étrange de se comporter pour celui qui avait défrayé la chronique au printemps 2016 justement pour avoir été accusé par les contrôleurs de l’AFLD d’avoir refusé de leur ouvrir sa porte pour un contrôle inopiné en son domicile le 16 février 2016. Mais Anouar Assila avait présenté une défense bien construite par ses avocats, en particulier par Adrien Bouvet, également coureur du Mans, sous les couleurs de « Run and Freedom », pour argumenter qu’il n’était en réalité pas présent ce jour-là au Mans, car parti au Maroc ou en Espagne (selon les témoignages) pour une visite à sa mère malade, et que le contrôleur l’aurait confondu avec Mohamed Ariri, qui ramenait sa voiture du garage.

Anouar Assila (à g.) en compagnie de Noureddine Ariri

Anouar Assila (à g.) en compagnie de Noureddine Ariri

L’énorme imbroglio constaté dans ce contrôle inopiné conduisait en mai 2016 la FFA à refuser de sanctionner l’athlète de Sarthe Running, estimant que le dossier et les méthodes utilisées par l’AFLD dans cette affaire rendaient trop fragiles la possibilité de le sanctionner.

L’AFLD allait faire appel de cette décision, et après plusieurs reports, l’audience disciplinaire prenait place le 9 février 2017, pour se conclure par une nouvelle relaxe d’Anouar Assila.

Une décision surprenante tant les éléments fournis pour la défense d’Anouar Assila comportaient d’erreurs et contre-vérités, comme par exemple, l’affirmation qu’il n’avait pu être vu arriver à son domicile avec sa voiture le soir du 16 février 2016, au motif qu’il n’aurait pas de permis de conduire. Cette excuse avait fait beaucoup rire au Mans et alentours, où chaque jour, Anouar Assila était vu en train de conduire, ce que j’avais moi-même pu constater en janvier 2017 lors du Cross Ouest France du Mans, alors qu’Anouar Assila repartait en fin de matinée après avoir vu son fils courir et avoir pris son propre dossard pour disputer l’épreuve des As de l’après-midi. Mais finalement, Anouar Assila ne s’était pas présenté au départ de la course, sans s’en justifier, prétextant par la suite une blessure qui se serait réveillée.

Un désaveu choquant contre Damien Ressiot

Les deux relaxes de la FFA, puis de l’AFLD, marquaient un désaveu certain sur la méthode utilisée par Damien Ressiot, pour bâtir le 2ème contrôle diligenté le 16 février à l’égard d’Anouar Assila. En effet, le contrôleur venu le matin à 7h44 pour un prélèvement se voyait répondre par Morgane Assila, l’épouse d’Anouar, que son mari était absent, parti au Maroc (dans les déclarations suivantes, il sera affirmé qu’il était parti en Espagne). Mais Olivier Grondin, le contrôleur, n’est nullement convaincu qu’Anouar Assila n’est pas dans la maison, et en rend compte à Damien Ressiot, qui utilise alors un subterfuge pour en avoir la preuve, et diligenter un 2ème contrôle le même jour en fin de journée.

Damien Ressiot joint Philippe Simier, alors responsable du club Sarthe Running, en se faisant passer pour un photographe qui cherche à contacter Anouar Assila. Selon Damien Ressiot, Philippe Simier aurait appelé l’athlète au téléphone, et aurait ensuite confirmé au patron des contrôles de l’AFLD qu’il était bien présent chez lui. Mais Philippe Simier va ensuite réfuter ces propos, et présenter un témoignage affirmant qu’il n’a jamais donné cette réponse, qu’Anouar Assila n’était pas au Mans, et Philippe Simier maintiendra cette version jusque devant l’AFLD, et même après avoir quitté fin 2016 le club Sarthe Running pour rejoindre l’Entente du Mans.

Philippe Simier, un témoin capital au soutien indéfectible

Cette version sera déterminante, et même si Michel Marle, patron de l’anti-dopage à la FFA, confirme que Philippe Simier lui a aussi déclaré à lui qu’Anouar Assila était bien présent en son domicile, au matin de ce contrôle, mais qu’il avait craint de s’y soumettre en raison de l’utilisation depuis plusieurs semaines de corticoïdes pour soigner une blessure. Michel  Marle affirme avoir demandé, sans succès, à Philippe Simier de tenter de raisonner Anouar Assila pour qu’il accepte le 2ème contrôle du soir. A noter que les arcanes de l’anti-dopage sont bien connues de Philippe Simier, qui officie régulièrement en qualité de contrôleur anti-dopage sur l’ensemble des épreuves de la région du Mans, en particulier pour le Cross Ouest France, et à nouveau lors de l’édition de janvier 2017.

Mais les avocats d’Anouar Assila vont parfaitement exploiter tous les éléments sujets à suspicion de ce dossier, pour les orienter à l’avantage de leur client, et cet imbroglio autour de la preuve de la présence du coureur au Mans en cette journée du 16 février va être l’élément moteur dans la relaxe prononcée par l’AFLD, jetant ainsi une opprobre particulièrement déplacée sur Damien Ressiot, un acteur fort de la lutte anti-dopage.

Anouar Assila avait ainsi remporté le premier round de cette partie, obtenant le soutien de moult observateurs, y compris de journalistes, plus prompts à remettre en cause les acteurs de l’anti-dopage qu’à s’interroger sur les raisons non avouées de telles démarches de contrôles… Et certains adhéraient complètement à la version d’Anouar Assila, affirmant que la publication de l’information sur notre site le 9 mars 2016 sur le lancement d’une procédure par la FFA l’avait privé d’une sélection en Equipe de France pour le mondial de semi-marathon…

Spe15, cible attitrée d’Anouar Assila

Notre site avait été ainsi la cible d’attaques très vindicatives et souvent ordurières de la part de soutiens inconditionnels d’Anouar Assila, qui après avoir refusé de répondre à mes questions au matin du 10 mars 2016, avait saisi toutes les occasions pour me ridiculiser, argumentant sur mon incompétence professionnelle. Récemment, des propos outranciers d’Anouar Assila à mon encontre étaient à nouveau apparus sur le Facebook d’Habib Mosbah, un proche de Nicolas Fernandez, suspendu, lui, pour usage d’EPO.

Il reste maintenant à attendre la suite de la procédure lancée par l’IAAF pour connaître le sort d’Anouar Assila, qui dispose d’un délai de deux mois pour présenter les arguments pouvant expliquer les variations anormales de ses taux sanguins. Quoi qu’il en soit, depuis le début de l’année, et son titre départemental de cross, Anouar Assila a disparu des compétitions. Il avait en effet annulé à la dernière minute sa participation au Championnat de France de semi-marathon de Bourg du 12 mars 2017, arguant de problèmes mécaniques de dernière minute sur son véhicule… Ou plutôt sur celui de sa femme ?

  • Texte : Odile Baudrier
  • Photo : Gilles Bertrand

Anouar Assila, sollicité par mes soins pour réagir à cette information, n’a pas répondu à mon appel.