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500 000 euros de primes sur le marathon français

Le Marathon de Paris est bien entendu le plus richement doté de France (photo organisation)

Les budgets primes déclarés sur les courses sur route français sont en net recul, seules 6% des épreuves françaises attribuent des primes contre 18% il y a 25 ans.
Seul le marathon résiste à la crise avec un budget total de 500 000 euros distribué en France. Analyse effectuée par Gilles Bertrand.

Est-ce la fin des primes dans le hors stade ?

La question circule dans le petit sérail des organisateurs de course sur route en proie à de réelles difficultés financières suite notamment au retrait massif des collectivités locales (essentiellement les conseils départementaux) dans leurs soutiens apportés aux manifestations.

Sur un échantillon de plus de 1000 épreuves organisées en ce début d’année et dont les résultats sont recensés sur le site fédéral, seuls 4% des épreuves françaises attribuent des primes aux coureurs. Ce chiffre est à pondérer car dans ce même panel, on recense 29% de trails, un univers où cette pratique est encore quasiment inexistante. En excluant donc les trails, nous obtenons donc 6% de courses sur route ayant recours aux primes. C’est trois fois moins qu’il y a 25 ans. A l’époque, le Carnet du Bipède recensait cet aspect de l’organisation. Il y avait même concurrence entre épreuves affichant avec fierté le montant des primes attribuées pouvant atteindre jusqu’à 150 000 francs pour le semi d’Avignon (dont 8000 francs au vainqueur), 100 000 à l’Humarathon (pour 10 000 au vainqueur) 50 000 à Blagnac (pour 10 000 au vainqueur), 20 000 à Autun et même 200 000 francs pour Marvejols – Mende dont 12 000 francs au vainqueur (en 1992). Un « marché » que se partageaient presque exclusivement les coureurs français, les Chauvelier, Thiébaut, Gonzalez…avant l’arrivée des coureurs de l’Est puis du Maroc et enfin de l’Afrique de l’Est, une économie du running déjà généreuse et florissante favorisant l’adoption d’un statut pro ou semi pro avec des revenus de cadres supérieurs. Une situation impensable aujourd’hui, seule Christelle Daunay peut se targuer d’être une vraie professionnelle du marathon alors que tous les autres marathoniens français bricolent entre boulot à mi temps, modestes primes et parfois aide financière du club.

Même les grandes classiques ont décidé de se serrer la ceinture

Aujourd’hui, les enveloppes sont de plus en plus maigres pour la très grande majorité d’entre elles, dépassant très rarement les 300 euros attribués aux vainqueurs hommes et femmes. Voici quelques exemples en ce mois de mai : 300 euros aux 10 km de Bohars, 200 euros aux Foulées de Chambry, 250 euros aux 10 km de Toulouges, 200 euros aux 10 km de Balma, guère plus pour le semi de Troyes avec 500 euros.

Même les grandes classiques ont décidé de se serrer la ceinture, les années glorieuses appartiennent au passé même si les scores de participations caressent des sommets jamais atteints. Toujours sur l’échantillon de mai, l’exemple de Strasbourg avec ses 17 000 coureurs est significatif. Il s’agit d’un grand rendez vous populaire mais pour autant, le cursus prime est à la baisse. Les vainqueurs ne perçoivent que 600 euros sur le 10 km et 800 pour le semi, ceci pour privilégier les Régionaux avec 400 euros aux vainqueurs sur les 2 distances soit au total 14 200 euros. Par ailleurs, les frais de déplacements et frais de séjours auparavant remboursés aux athlètes ont désormais disparu des radars.
Vache maigre aussi à Maroilles avec 1000 euros en 2014 puis 800 euros en 2016 pour la victoire et plus aucun frais remboursé. Chez son voisin, plus aucune prime à Trith (pour un total de 70 000 francs et 5000 francs au vainqueur en 1992) qui était considéré autrefois comme la revanche de Maroilles. Ou bien encore 1000 euros à Alençon – Médavy la classique normande qui dans le passé accordait 1500 euros à la place de 1. Aujourd’hui Pierre Vannier, l‘organisateur est strict. Première mesure, vérifier que les coureurs soient bien en situation régulière sur le sol français. Deuxième mesure, aujourd’hui, l’athlète doit payer lui-même son dossard et aucun frais n’est remboursé. A l’arrivée, le chèque est même remis en direct au coureur, sans passer par le manager.

Les organisateurs, ils sont 80 pour les labels nationaux, n’ont donc pas d’autre choix que d’établir une grille de primes

Mais pour autant, malgré des grilles de primes qui ne flambent plus, une petite armée de fantassins chasse encore dans ce magma trouble, Kenyans et Ethiopiens et quelques Burundais pour la majorité d’entre eux. Une aubaine pour les organisateurs à labels nationaux et internationaux pour l’obtention à bas prix de ce sésame accordé par la Fédération Française d’Athlétisme.
Car pour se voir attribuer un label international, une performance est exigée soit 28’15’’ sur 10 km et 1h 02’15’’ sur semi ou 4 perfs N2 soit 29’45’’ ou 1h 05’30’’. Pour un label national, trois chronos N4 sont obligatoires soit 31’15’’ sur 10 ou 1h 08’30’’ sur 21 km.

Les organisateurs, ils sont 80 pour les labels nationaux, n’ont donc pas d’autre choix que d’établir une grille de primes pour attirer des coureurs susceptibles de réussir de telles performances. Ceci explique la présence sur le sol français d’une petite tribu de coureurs est africains qui week-end après week-end, sillonne la France, à faire le job. A titre d’exemples, ils étaient 12 à Troyes pour se partager 5635 euros, 9 à Toulouges pour empocher un total de 1500 euros, 10 encore pour les foulées de Gayant, 9 à Maroilles pour une somme de 7300 euros cumulés, 10 à Annecy pour le semi pour un total de 2450 euros. Certains managers se sont même spécialisés pour meubler les plateaux dans les courses à labels internationaux exigeant à la fois des perfs et plusieurs pays au départ, plaçant ici et là Russes, Biélorusses et Ukrainiens aux côtés de Kenyans et Ethiopiens. Pour exemple, le semi de Boulogne en quête d’un label IAAF bronze doit aligner 5 hommes sous les 1h 04’ et 5 femmes sous les 1h 15’.
Précisons que le système des labels rapporte à la FFA la somme de 270.000 euros chaque année.

Sur 51 marathons français organisés en 2016, 28 vont ainsi distribuer des primes

Quant aux marathons français, ils ne sont pas encore au pain sec même si certains ont choisi de renoncer aux primes. Le meilleur des exemples, Bordeaux qui a clairement pris l’option « populaire » avec au final, un coureur local, Saïd Belharizi, vainqueur à 38 ans en 2h 32’33’’. Marseille tombé dans le giron de ASO a également saigné son budget primes. Sur le papier, il y avait bien un total de 20 600 euros pour les 10 premiers hommes et femmes mais ils devaient tous réussir respectivement moins de 2h 20’ et moins 2h 30’ (10 300 si moins de 2h 30’ et 2h 40’ et 7700 si moins de 2h 40’ et 2h 50). Résultat, sur la Canebière, Laurent Rachard l’emporte en 2h 51’28’’ et Viola Walther en 3h 17’18’’ et aucune prime n’a été versée. Un principe en passe de se généraliser et qui écarte presque d’office les chasseurs de primes africains.

Sur 51 marathons français organisés en 2016, 28 vont ainsi distribuer des primes dont les montants ne sont pas toujours clairement définis sur les sites internet des épreuves (uniquement sur demande pour les épreuves ASO mais aussi Annecy, Toulouse, Montpellier…).
Sur le papier, le montant des enveloppes financières reste encore correct avec une forte généralisation des primes à la performance et le plus souvent le non remboursement des frais de voyage. Paris domine bien entendu le pavé du marathon avec un budget lui aussi indexé sur les performances avec une prime au vainqueur allant du simple au double selon la performance, 50 000 euros ou 25 000 euros.

Ainsi pour cette saison 2016, près de 500 000 euros de primes seront distribués à l’arrivée des marathons français, une petite économie dont sont totalement exclus les marathoniens français. Aujourd’hui, le débat est posé. Quelles mesures peuvent être prises pour mieux valoriser l’élite française ? A l’échelle de la fédération, des organisateurs et des partenaires, les solutions existent. Le plan de relance marathon élaboré en 2015 devrait intégrer en priorité cette réflexion première, car les coureurs, acteurs de cette économie et laissés pour compte du système, attendent de vraies mesures.

LES BUDGETS PRIMES DES MARATHONS FRANÇAIS

Ces chiffres ne tiennent pas compte des éventuelles primes de notoriété + primes aux intermédiaires pour monter les « plateaux »
. Paris : 202 500 euros distribués cette année, 50 000 au vainqueur homme car moins de 2h 11’ 45’’et 25 000 vainqueur femmes car plus 2h 23’15’’
. La Rochelle : 41 500 euros et 4000 au vainqueur si moins de 2h 13’…et 12 000 si moins de 2h 08’
. Annecy : 28 450 euros + 2000 au record + 2000 si moins de 2h 08’ et 2h 31’, 6000 au vainqueur
. Nice : 24 000 euros et 7500 au vainqueur si 2h 13’, 3000 si 2h 16’
. Mont St Michel : 24 000 euros et 3000 au vainqueur (en 2015)
. Caen : 22 000 euros et 3000 au vainqueur
. Marseille : 20 600 euros si les 10 premiers hommes en moins de 2h 20’ et les 10 premières femmes en moins de 2h 30’ et 4000 euros aux vainqueurs si moins de 2h 20’ et moins de 2h 30’
. Route du Louvre : 18 000 euros (une moyenne selon les perfs) et 4000 au vainqueur (moins de 2h 15’) – Record : 5000 euros pour moins de 2h 10’
. Val de Reuil : 17 000 euros et 1800 au vainqueur
. Nantes : 16 000 euros et 2000 au vainqueur
. Rennes : 13 000 euros et 800 au vainqueur
. Poitiers : 8000 euros et 1200 au vainqueur
. Laval : 7500 euros et 800 au vainqueur
. Nouméa : 6800 euros et 900 au vainqueur
. Metz : 6000 euros si moins de 2h 13’, 3000 si moins 2h 16’ et 1500 si plus de 2h 16’
. Strasbourg : 3200 euros et 500 au vainqueur
. Royan : 3000 euros et 500 au vainqueur
. Amiens : 2070 euros et 300 au vainqueur
. Orléans : 1600 euros et 400 au vainqueur – 500 euros au record
. Montauban : 400 euros au record
. Gueugnon : 300 euros si 2h 28’ et 3h 04’ (femmes)

> Texte : Gilles Bertrand